Début janvier dernier, l’Internal Revenue Service (IRS), agence du gouvernement fédéral des Etats-Unis qui collecte l’impôt sur le revenu et des taxes diverses, a mis en place la reconnaissance par l’intermédiaire de ID.me pour les contribuables américains qui désirent consulter le crédit d’impôt pour enfants et les paiements anticipés de crédit, étendant élargir cette technologie à tous ses services et tous les contribuables très rapidement. Devant le tollé que l’utilisation d’un service tiers a provoqué, l’IRS a annoncé qu’elle renonçait à recourir aux services d’ID.me.
S’il est bien une technologie de l’IA qui suscite débats et inquiétudes, c’est celle de reconnaissance faciale. Alors que la Chine l’utilise pour la répression des journalistes, des étudiants étrangers, de la communauté ouigour, des «personnes préoccupantes», l’Europe essaie d’encadrer son utilisation dans les espaces publics via le RGPD. Pourtant, nombre d’entre nous utilise cette technologie au quotidien que ce soit pour déverrouiller son smartphone ou son ordinateur, entrer dans son entreprise, avoir ensuite accès aux appareils et aux applications informatiques. Pratiquement tous les services policiers mondiaux y ont recours et, de plus en plus de villes installent des caméras intelligentes. Les problématiques soulevées par la reconnaissance faciale sont celles de l’utilisation des données et des biais algorithmiques.
Les biais de la reconnaissance faciale
Des études ont démontré que la plupart des algorithmes de reconnaissance faciale présentent des «différentiels démographiques» qui peuvent aggraver leur précision en fonction de l’âge d’une personne, sexe ou race. Ainsi, les logiciels entraînés sur des sujets majoritairement à peau claire sont logiquement moins efficaces lorsque la peau est foncée, et ce serait aussi le cas si la personne concernée est une femme. De nombreuses ONG et élus politiques ont accusé la reconnaissance faciale de systématiser des préjugés humains déjà présents dans la société, comme le racisme tout en soulignant les risques liés à la protection des données personnelles. Sous la pression, aux USA, Amazon, Microsoft, IBM et Google ont arrêté de vendre aux forces de police leurs logiciels de reconnaissance faciale et Facebook a abandonné la reconnaissance faciale en novembre dernier.
L’IRS et la reconnaissance faciale d’ID.me
L’IRS a mis en place la solution de reconnaissance faciale d’ID.me début janvier et devait l’étendre à la consultation de tous les documents fiscaux personnels sur le site Web de l’IRS d’ici quelques mois dans le but d’éviter les fraudes. ID.me est largement utilisé aux USA, y compris par d’autres institutions gouvernementales et reconnu comme fiable. Pour vérifier son identité avec ID.me, il suffit de fournir une photo d’un document d’identité (permis de conduire, une carte d’identité ou passeport) et prendre un selfie avec un smartphone ou un ordinateur via la webcam. En tant que fournisseur de services d’identification certifié selon les normes fédérales, ID.me est tenu de stocker les données des personnes. C’est ce qui a alerté les défenseurs des droits privés et certains élus. Mike Crapo, sénateur, a déclaré:
« Il est fort probable qu’avec des informations personnelles sur 70 millions d’individus, y compris des données biométriques, ID.me pourrait être une cible de choix pour les cybercriminels, les employés voyous et l’espionnage. »
Devant l’ampleur des protestations, l’IRS renonce à la reconnaissance faciale d’ID.me et déclare :
« L’IRS prend au sérieux la confidentialité et la sécurité des contribuables, et nous comprenons les préoccupations qui ont été soulevées .Tout le monde devrait se sentir à l’aise avec la manière dont ses informations personnelles sont sécurisées, et nous recherchons rapidement des options à court terme qui n’impliquent pas la reconnaissance faciale. »
Cependant, l’IRS souligne que cet abandon pourrait entraîner «les plus grandes perturbations pour les contribuables pendant la saison des dépôts» et la solution d’ID.me sera donc abandonnée après. Selon ses déclarations, l’agence «développera et mettra en ligne rapidement un processus d’authentification supplémentaire qui n’implique pas la reconnaissance faciale.»