Depuis des années, des chercheurs s’intéressent aux possibles applications de la robotique et de l’intelligence artificielle dans nos sociétés à court, moyen et long termes. En 2013, dans la fameuse étude d’Oxford sur l’avenir de l’emploi, Carl Benedikt Frey et Michael Osborne estimaient que « 47 % du total des emplois aux Etats-Unis présentaient de grands risques de devenir automatisables d’ici 2035 ». Cependant, une étude de juillet 2016 de McKinsey & Company va plus loin en affirmant que seulement avec la technologie à notre portée aujourd’hui, il serait possible d’automatiser 45% des emplois.
Les interrogations et les craintes suscitées par le développement de l’intelligence artificielle dans nos vies quotidiennes, ont amené l’agence danoise DARE2 et Bloch&Ostergaard à réaliser une analyse comparative assez intéressante. Ils ont analysé la perception et l’ouverture de sujets à l’idée de travailler avec ou sous les ordres de « programmes informatiques impartiaux ». Autrement dit « un robot logiciel qui prend des décisions ou fait des propositions de décisions basées sur des données RH, commerciales ou financières ». Aucun préjugé personnel, social ou culturel donc puisque le robot ne tiendrait compte que des données à sa disposition.
L’étude a été menée sur des échantillons d’employés aux Etats-Unis et au Danemark en août 2016. Les résultats sont assez surprenants car on note de grandes variations en ce qui concerne la perception et l’ouverture d’un pays à l’autre.
La perception face au développement de robots et d’intelligence artificielle dans les différents secteurs de l’emploi
Sur le graphique ci-dessus, à la question ‘Pensez-vous que votre emploi actuel risque d’être remplacé par l’émergence de nouvelles technologies?’, on constate d’importantes différences de perception entre Américains et Danois.
30% des employés américains interrogés pensent qu’en effet leur travail risque de disparaitre au profit de nouvelles technologies contre 43% de leurs compatriotes qui sont en désaccord avec cette affirmation. 27% n’ont pas d’avis sur la question.
Du côté danois, les chiffres sont moins contrastés car plus de la majorité des personnes ayant répondu à l’enquête, 63%, sont en désaccord avec l’idée que leur emploi ne sera remplacé dans le futur. Seulement 18% le pensent et 19% n’avaient pas d’opinion au moment du sondage.
Alors que la très grande majorité des analyses sur l’impact de l’intelligence artificielle et de la robotique sur les emplois indique qu’à moyen et long terme nos sociétés devront faire face à d’importants changements, les salariés danois semblent donc plutôt optimistes concernant leurs emplois.
La question de la confiance en l’intelligence artificielle
Au sujet de la confiance, les résultats sont est très intéressants car d’après l’étude de DARE2, 37% des salariés américains considèrent qu’un programme informatique impartial serait « plus digne de confiance et éthique que leurs dirigeants et gestionnaires actuels. » D’un autre côté, 38% préféreraient que les résultats de leur travail soient évalués par un programme informatique impartial plutôt que par les dirigeants et gestionnaires actuels.
La question de l’impartialité des intelligences artificielles se pose tout de même car même si elles n’ont pas de préjugés influençant leur prise de décision puisqu’elles se basent sur des données, elles restent en partie conçues par l’homme. Ce dernier pourrait également, dans une certaine mesure, intégrer certains critères qui, même quantifiables, pourraient être sujet à débat.
La perception des dirigeants par les salariés
Si les salariés danois sont très sceptiques quand à laisser une intelligence artificielle gérer une entreprise, les travailleurs américains le sont beaucoup moins. Le résultat peut paraître surprenant mais d’après l’étude de DARE2, 32% des Américains préfèreraient que leur entreprise soit gérée par un programme informatique impartial plutôt que par un dirigeant humain.
Ce chiffre s’explique par le mécontentement général des Américains concernant leurs conditions de travail, comme le mettait en avant le Conference Board Job Satisfaction survey de 2014. Les 52,3% de personnes se présentant comme malheureuses au travail permettent de mieux comprendre les 32% de salariés américains disposés à travailler sous les ordres d’une intelligence artificielle.
De l’autre côté de l’Atlantique, les salariés danois ne sont que 5% à être en accord avec cette proposition. Afin d’analyser ce résultat, il est bon de rappeler que selon l’enquête menée par la Commission européenne, 94% des danois sont satisfaits de leurs conditions de travail. Cependant le pourcentage de travailleurs danois souhaitant voir un programme informatique impartial interférer dans les décisions de leur direction augmente à 17% lorsqu’on leur demande s’ils seraient d’accord avec une gestion conjointe entre un humain et une intelligence artificielle. Aux Etats-Unis, 45% des salariés sont à faveur de cette idée.
Les différences entre les résultats américains et danois sont en partie liées à la culture du travail propre à chacun de ces deux pays et au niveau de satisfaction des salariés en ce qui concerne leurs conditions de travail. Les pourcentages élevés que l’on note chez les employés américains peuvent être perçus comme un besoin de changement qui mènerait à une plus grande automatisation de la gestion des entreprises.
Voici l’infographie entière concernant les salariés américains: