Les Femmes et la Tech, c’est le sujet du nouveau rapport de l’Observatoire de l’égalité femmes-hommes Harris Interactive réalisé pour le Think Tank Marie-Claire Agir pour l’égalité. Cette enquête menée en ce début d’année 2019 met en évidence plusieurs enseignements.
La Tech, un univers qui attire différemment les femmes et les hommes
Définie comme l’ensemble des métiers et secteurs d’activités liés aux nouvelles technologies et au numérique (internet, digital, programmation/code, intelligence artificielle, data, univers des start-ups, etc.), le secteur de la Tech ne laisse pas les Français indifférents : la très grande majorité d’entre eux en a une bonne image (90%). Cette bonne image est cependant peu structurée, seuls 23% indiquant avoir une très bonne image du secteur. On distingue nettement certaines populations chez qui cette très bonne image est plus prononcée : les hommes (30%), les Français les plus jeunes (43%) où se concentrent principalement les populations étudiantes (49%) ou les couples avec enfants (27%). On note également, chez ceux qui indiquent travailler aujourd’hui dans le secteur de la Tech, une meilleure image que la moyenne (39% de très bonne image). Ces populations témoignent ainsi d’un a priori encore plus favorable que l’ensemble à ce secteur.
La Tech jouit d’une image très positive. À tel point que lorsque l’on interroge les Français des générations actives aujourd’hui, 63% déclarent qu’il s’agit d’un univers dans lequel ils aimeraient travailler, un chiffre très élevé si on tient compte de la diversité des affinités et des parcours de vie des profils individuels. Les hommes montrent une appétence particulière pour le secteur (67%), quand les femmes sont plus nombreuses que la moyenne à rejeter cette option. Derrière cette attractivité légèrement genrée en termes de vie professionnelle se cache un intérêt genré lui aussi pour l’actualité des nouvelles technologies de manière générale. Si dans l’ensemble, 74% des Français déclarent qu’il s’agit d’un domaine qui les intéresse, les hommes (81%) sont bien plus nombreux que les femmes (67%) à faire part de leur intérêt. Outre les femmes, dont 33% déclarent qu’elles n’ont pas d’affinités particulière avec l’actualité de la Tech, les personnes âgées de 65 ans et plus (32%) ou les personnes issues des catégories populaires (31%) montrent un désintérêt légèrement plus poussé que la moyenne (26%). Il y a ainsi un lien direct entre attractivité du secteur sur le plan professionnel et attractivité du secteur sur le plan personnel.
Le constat d’une affinité genrée avec le secteur se retrouve dans l’envie même de développer des compétences liées à l’univers des technologies. Si dans l’ensemble, 59% des Français déclarent qu’ils seraient intéressés par le fait d’apprendre à programmer ou coder, c’est à nouveau davantage le cas des hommes (64%) que des femmes, plus nombreuses que la moyenne à manifester leur manque d’intérêt (47% contre 41%). Les femmes sont également plus nombreuses que les hommes à déclarer qu’elles auraient peur de ne pas de disposer des compétences nécessaires pour apprendre à programmer ou coder (70% contre 60% des hommes).
Mais les clivages n’existent pas seulement entre les femmes et les hommes. La Tech étant intimement liée aux nouvelles technologies, on observe de fortes divergences générationnelles dans l’attractivité des pratiques de programmation ou de code. Les plus jeunes (moins de 35 ans : 70%) et les Français de 35 à 49 ans (65%) se montrent ainsi plus intéressés que les autres pour apprendre ces techniques, quand les Français de 65 ans ou plus marquent davantage non seulement leur désintérêt mais également leur crainte de ne pas disposer des compétences nécessaires. A noter que les étudiants se montrent particulièrement disposés à apprendre la programmation et le code (71%), signe une nouvelle fois de l’attractivité de la Tech et de l’importance de la maîtrise des nouvelles technologies dans la perspective d’intégration en milieu professionnel. Si bien qu’au-delà des différences hommes-femmes, on peut souligner que la crainte de ne pas disposer des compétences nécessaires touche 65% des Français, qui peuvent se sentir mis à l’écart de cet univers. De larges opportunités existent ainsi pour dédramatiser l’univers de la Tech et possiblement, faire tomber les barrières psychologiques qui peuvent exister et éloignent certaines populations du secteur.
Les représentations associées à la Tech : un secteur valorisant et ouvert à tous ?
La Tech, pour les Français, est un secteur aux attributions multiples. Derrière ce terme, et sans que leur origine sociale fasse beaucoup varier les perceptions, ils rangent principalement toutes les disciplines liées à l’informatique (91%), à internet (90%) aux nouvelles technologies (89%) et au numérique (89%). Les termes de digital (86%), programmation (83%), télécommunications (83%), intelligence artificielle (82%) ou encore data (80%) lui sont encore attribués par plus de 8 Français sur 10. Les terminologies liées à la science (79%), comme les algorithmes (76%) ou le code (75%) arrivent, quoique reliées à la Tech selon la majorité, en bas de tableau, où se situent également les termes liés au monde entrepreneurial : start-up (73%) et ubérisation (51%) concept dont l’association à la Tech sème davantage le doute.
Dans le détail, on note néanmoins que la notion de Tech n’est pas totalement structurée, peu de termes convaincant la majorité des Français qu’il correspondent très bien à ce secteur. Seules l’informatique (50%) et les nouvelles technologies (50%) convainquent 1 Français sur 2 de leur fort lien avec la Tech. On constate cependant que dans l’ensemble, les hommes, ainsi que les personnes appartenant aux catégories les plus aisées ont davantage tendance que les autres à considérer que les différents termes s’appliquent très bien au monde de la Tech.
On l’a noté, la Tech jouit d’une très bonne image auprès des Français. Et cette très bonne représentation du secteur perdure, malgré les mêmes écueils de structuration (peu de réponses « correspond très bien »), lorsqu’on interroge dans le détail ses prérogatives et dynamiques. Enjeu majeur, le sentiment que les métiers de la Tech sont des métiers d’avenir domine les perceptions des Français (93%, dont 48% correspond très bien). Mais de manière générale, les Français prêtent à ces métiers de nombreuses qualités : dans les représentations, ils permettent de travailler depuis n’importe quelle région ou ville de France (89%), permettent de travailler de chez soi (88%), sont attractifs (88%), sont stimulants intellectuellement (88%), sont bien rémunérés (87%), sont valorisants au sein de la société (87%) et permettent une évolution professionnelle rapide (84%). Néanmoins, ils impliquent aussi quelques exigences, comme la demande d’une forte implication personnelle (89%) ou le fait d’être attiré par les sciences, 88% estimant que ces métiers sont principalement scientifiques ou techniques. On note par ailleurs que les représentations varient peu selon l’origine sociale des interrogés, ceux qui ont une bonne image du secteur se montrant seulement encore un peu plus en phase avec ces perceptions.
Le secteur de la Tech suscite cependant quelques interrogations chez les Français concernant son ouverture. Certes, 88% estiment que les métiers qu’il propose sont ouverts aux hommes comme aux femmes, indiquant qu’ils ne perçoivent pas de formes de discrimination a priori dans cet univers. En revanche, 65% d’entre eux font le constat qu’aujourd’hui, les postes y sont principalement occupés par des hommes. Un constat qui n’est pas particulièrement relayé par les femmes elles-mêmes, mais par les générations les plus jeunes ou les générations actives (74% chez les moins de 35 ans ; 72% chez les 35-49 ans) et les personnes issues des catégories populaires (71%). Il y aurait ainsi un hiatus certain entre la perception d’une ouverture égalitaire entre hommes et femmes et la réalité d’un secteur qui reste majoritairement masculin. Nombreux sont ceux également qui voient dans ce secteur d’activité des métiers réservés plutôt à la jeunesse (64%), posant une seconde barrière d’âge derrière celle de genre.
L’attractivité du secteur dépasse pourtant ces écueils : lorsqu’on interroge des parents d’enfants de moins de 25 ans, dont la plupart sont en âge d’étudier ou de commencer leur vie professionnelle, la très grande majorité d’entre eux affirment qu’ils pourraient recommander à leurs enfants de travailler dans la Tech, que ces enfants soient des garçons (87%) ou des filles (83%), sans grande différence selon le genre. On note surtout, dans la propension à recommander le secteur, des différences selon l’origine sociale des parents : les hommes et les cadres se montrent plus enclins que la moyenne à encourager leurs enfants dans cette voie.
Quelles qualités pour réussir dans la Tech ?
Principalement perçu par les Français comme lié aux sciences et aux techniques, notamment dans l’univers de l’informatique, le secteur de la Tech requiert selon eux, pour qui souhaite y travailler, à la fois une maîtrise des nouvelles technologies (75%) et des outils techniques (60%), deux compétences sur lesquelles la plupart s’accordent. L’esprit scientifique, dans une moindre mesure apparaît comme nécessaire pour intégrer ce secteur (38%), quand d’autres compétences vont paraître plus périphériques. La maîtrise de compétences pluridisciplinaires (33%) ainsi que des langues étrangères (33%) apparaît comme secondaire, mais reste plus importante pour évoluer dans le secteur que la maîtrise des mathématiques pures (27%), que les Français distinguent plutôt du secteur. La fibre commerciale, de même, est un atout perçu seulement comme marginal (12%).
Au-delà des compétences techniques, certaines dispositions personnelles sont particulièrement associées à la Tech. Et c’est la créativité (62%) qui est de loin la qualité que les Français estiment la plus nécessaire pour travailler dans le secteur, complétée par un fort esprit d’initiative (42%) et de la curiosité (37%). Cette créativité ne fonctionne cependant pas seule : ils est nécessaire aux yeux des Français qu’elle soit accompagnée d’une rigueur (43%) qui puisse l’encadrer. La réactivité (38%) ainsi que l’esprit d’équipe (29% et jusqu’à 42% chez les étudiants) apparaissent également comme nécessaires pour évoluer dans ce secteur qui évolue constamment.