L’Académie des sciences attribue de nombreux prix et médailles, venant honorer des scientifiques d’expérience ou encourager de jeunes chercheurs en début de carrière. Ces récompenses concernent l’ensemble des domaines de recherche, fondamentaux ou appliqués.
Une première cérémonie de remise des prix de l’Académie des sciences a lieu le mardi 15 octobre 2019, sous la coupole de l’Institut de France. La deuxième cérémonie se tiendra le 26 novembre 2019.
Prix de mathématique
PRIX MARC YOR (3000€) Rémi Rhodes et Vincent Vargas
Le prix est décerné à Rémi Rhodes, professeur des universités à l’Institut de mathématique à l’université d’Aix- Marseille et Vincent Vargas, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique à l’École normale supérieure à Paris pour leurs travaux sur le chaos multiplicatif et la gravité quantique de Liouville.
Dans une longue et remarquable série de travaux (dont certaines des importantes contributions récentes sont en collaboration avec François David et/ou Antti Kupiainen), Rémi Rhodes et Vincent Vargas, ont développé de nombreux aspects de la théorie du chaos multiplicatif Gaussien, et ont su les utiliser pour aboutir à une approche probabiliste concrète, constructive et féconde de la théorie quantique des champs de Liouville, qui consiste à définir sur une surface de Riemann donnée, une métrique aléatoire très irrégulière mais très naturelle du point de vue de la physique théorique.
PRIX JEAN-JACQUES MOREAU (3000€) Francis Bach
Le prix est décerné à Francis Bach, ingénieur des Mines, en détachement au département d’informatique de l’École normale supérieure au Centre de recherche Inria de Paris, pour ses travaux portant principalement sur les liens entre l’optimisation et l’apprentissage automatique (machine learning).
Ils ont permis des contributions majeures dans les deux domaines, avec notamment le développement et l’analyse fine d’algorithmes stochastiques permettant le traitement de données massives, ainsi que la formalisation élégante des problèmes de parcimonie structurée et leurs liens avec l’optimisation convexe et les algorithmes du premier ordre.
PRIX THÉRÈSE GAUTIER (2500€) Gérard Freixas I Montplet
Le prix est décerné à Gérard Freixas I Montplet, Chargé de recherche au Centre national de la recherche scientifique à l’Institut de mathématiques de Jussieu-Paris Rive Gauche.
Gérard Freixas I Montplet est leader mondial de la géométrie d’Arakelov et ses liens aux formes automorphes. Il a su surmonter de grandes difficultés analytiques pour étendre le champ de la théorie d’Arakelov. Il a aussi obtenu une magnifique formule pour une valeur de la dérivée de la fonction zeta de Selberg.
Prix de chimie
PRIX SEQENS de l’Académie des sciences (6000€) Sébastien Lecommandoux
Le prix est décerné à Sébastien Lecommandoux, professeur à l’École nationale supérieure de chimie, biologie et physique de Bordeaux-INP, au laboratoire de chimie des polymères organiques.
Sébastien Lecommandoux développe des concepts innovants à l’interface de la chimie des polymères et de l’auto-assemblage, à la frontière de la nanomédecine et des biomatériaux. Ses approches biomimétiques combinant des polymères de synthèse et des biopolymères (polypeptides, polysaccharides, protéines), lui ont permis de concevoir des vésicules autoassemblées capables d’interagir de façon spécifique avec des milieux vivants complexes sous l’action de divers stimuli (pH, champ magnétique, photocontrôle…).
PRIX PHILIPPE A GUYE (3000€) Hélène Budzinski
Le prix est décerné à Hélène Budzinski, directrice de recherche au Centre national de la recherche scientifique – Environnements et Paléoenvironnements Océaniques et Continentaux, université Bordeaux à Talence.
Hélène Budzinski est l’une des meilleures spécialistes mondiales du suivi biogéochimique d’ultra-traces de contaminants dans l’environnement terrestre et aquatique. Ses travaux pionniers en chimie analytique permettent aujourd’hui un suivi écotoxicologique de polluants “émergents” dispersés dans l’environnement parmi lesquels de nombreux composés pharmaceutiques et des perturbateurs endocriniens.
PRIX LANGEVIN (1500€) Alain Walcarius
Le prix est décerné à Alain Walcarius, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique, directeur du laboratoire de chimie physique et microbiologie pour les matériaux et l’environnement de l’Université de Lorraine et du CNRS.
Alain Walcarius est récompensé pour l’importance de ses découvertes interdisciplinaires innovantes fondées sur une maîtrise de l’organisation nanométrique de solides mésoporeux à structures régulières, et leurs applications au développement ingénieux de capteurs et biocapteurs, de matériaux destinés au traitement des effluents de l’aval du cycle électronucléaire ou à la remédiation de l’environnement.
PRIX CHARLES DHÉRÉ (1500€) Franck Denat
Le prix est décerné à Franck Denat, professeur à l’université de Bourgogne, directeur de l’Institut de chimie moléculaire de l’université de Bourgogne à Dijon.
Franck Denat est distingué pour ses travaux sur l’emploi d’agents chélatants multifonctionnels dans le domaine de l’imagerie médicale par marquage de vecteurs biologiques et de nanoparticules. Ils lui valent une reconnaissance internationale. Son apport tant au niveau de la recherche fondamentale que de la recherche à objectifs finalisés et de la recherche technologique est particulièrement digne d’éloges.
PRIX PAUL PASCAL (1500€) Caroline Mellot-Draznieks
Le prix est décerné à Caroline Mellot-Draznieks, directrice de recherche au Centre national de la recherche scientifique au laboratoire de chimie des processus biologiques au Collège de France à Paris.
Caroline Mellot-Draznieks est une chimiste théoricienne qui s’intéresse à la science des matériaux. Son activité, réalisée en collaboration avec des expérimentateurs a trois directions :
1. la description des processus d’adsorption moléculaires dans les zéolithes et les solides nanoporeux,
2. la description de systèmes construits sur des assemblages de fragments métalliques et organiques (MOF pour metal-organic framework),
3. l’analyse et la prédiction de composés construits sur les MOF pour les processus photo- et électrocatalytique
PRIX CLAVEL-LESPIEAU (1500€) Jean-Luc Parrain
Le prix est décerné à Jean-Luc Parrain, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique, directeur de l’équipe de recherche de chimie de synthèse organique à visée thérapeutique à l’université d’Aix-Marseille, pour ses travaux les plus récents concernant la synthèse élégante de spirolactones à l’aide de séquences “domino” de trois réactions consécutives.
Il faut noter également la synthèse de nouveaux ligands permettant la préparation catalytique boranes carbéniques avec des énantio-sélectivités atteignant 98%, ainsi que la synthèse de nouveaux ligands capables de stabiliser l’astate-211, un radioélément prometteur dans l’imagerie médicale.
PRIX GRAMMATICAKIS-NEUMAN (1500€) Gilles Guichard
Le prix est décerné à Gilles Guichard, directeur de recherches au CNRS à l’Institut Européen de chimie et biologie à Bordeaux.
Gilles Guichard est récompensé pour sa contribution exceptionnelle à la chimie et physico-chimie des foldamères et plus particulièrement pour la découverte des oligourées hydrosolubles capables de s’auto-organiser comme des protéines.
MÉDAILLE BERTHELOT
La médaille est décernée à Hélène Budzinski, lauréate du prix Philippe A. Guye.
Prix de physique
Prix VERDAGUER – Fondation de l’Institut de France (3000€) Frédéric Pincet
Le prix est décerné à Frédéric Pincet, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique au laboratoire de physique statistique à l’École normale supérieure de Paris, pour ses trois apports essentiels à la physique de la biologie cellulaire
Il a dans un premier temps apporté des contributions pionnières quantitatives sur l’adhésion cellulaire. Il a par la suite résolu un paradoxe concernant la liaison streptavidine-biotine, une paire de protéines utilisée dans de nombreuses expériences “in vitro”. Enfin, il a développé une approche expérimentale quantitative originale dans l’étude des protéines de fusion membranaires SNARE, responsables entre autres de la transmission synaptique.
PRIX ANIUTA WINTER-KLEIN (3000€) Victor Dotsenko
Le prix est décerné à Victor Dotsenko, professeur de physique à la faculté des sciences et ingénierie de Sorbonne université.
Victor Dotsenko est spécialiste de la théorie des systèmes désordonnés et des verres de spins. Il est internationalement connu depuis le début des années 80 pour ses travaux sur l’effet de la présence d’impuretés sur les transitions de phase du second ordre et en particulier sur le comportement critique du modèle d’Ising bidimensionnel. Plus récemment, en s’appuyant sur une représentation du problème de polymère dirigé en termes d’un gaz quantique de bosons en interaction, et en combinant la méthode des répliques avec l’ansatz de Bethe, il a réussi un tour de force en montrant que les fluctuations d’énergie libre des polymères dirigés en dimension 2 sont exactement décrites par la distribution de Tracy-Widom, découverte au cours des années 90 dans un tout autre contexte, celui de la théorie des matrices aléatoires.
PRIX DE MME CLAUDE BERTHAULT – Fondation de l’Institut de France (2000€) Bertrand Eynard
Le prix est décerné à Bertrand Eynard, chercheur au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives à l’Institut de physique théorique à Saclay.
Bertrand Eynard est un physicien mathématicien qui a contribué à la gravité quantique et sa relation avec la géométrie aléatoire. Son travail sur les courbes spectrales et la méthode de récurrence topologique est très connu. Développant cette méthode avec son élève Orantin, méthode qui porte aujourd’hui leurs noms, ils purent étudier et calculer à tous les ordres les fonctions de corrélations dans des modèles de matrices. Mais cela leur permis d’aller bien au-delà : variant les exemples de courbes spectrales, caractérisées par leurs invariants, il résout les équations de boucles d’intégrales matricielles, ainsi que pour nombre de problèmes de géométrie énumérative tels que l’énumération des cartes sur une surface de genre donnée, de partitions, de nombres de Hurwitz, de nombres d’intersection, ou encore des invariants de Gromov-Witten. Cette méthode a également l’intérêt de révéler des relations profondes entre matrices aléatoires, systèmes intégrables classiques et quantiques, et des problèmes de mathématiques pures (géométrie des surfaces, géométrie algébrique, théorie des nombres).
PRIX LECONTE (1500€) Michael Le Bars
Le prix est décerné à Michael Le Bars, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique à l’Institut de recherche sur les phénomènes hors équilibre à Marseille.
Michael Le Bars a réalisé un ensemble d’expériences de laboratoire très élégantes sur les instabilités elliptiques, la convection thermique, les tourbillons et les ondes dans les milieux stratifiés. Celles-ci ont permis une meilleure compréhension des mécanismes à l’oeuvre dans divers écoulements astrophysiques et géophysiques. En particulier, Michael Le Bars a fait considérablement progresser notre connaissance des écoulements induits par les forces de marée dans les noyaux planétaires. Il a également proposé une modélisation auto-consistante de l’oscillation quasi-biennale pour laquelle il a pu estimer les biais résultants d’une paramétrisation des petites échelles.
PRIX GUSTAVE RIBAUD (1500€) Silvia Galli
Le prix est décerné à Silvia Galli, chargée de recherche au Centre national de la recherche scientifique à l’Institut d’Astrophysique de Paris, pour son expertise dans l’analyse des données du rayonnement de fond cosmologique et leur interprétation scientifique.
Silvia Galli est l’un des principaux architectes du programme de vraisemblance qui permet la comparaison entre les données cosmologiques et les modèles théoriques. Elle a co-dirigé la mesure des paramètres cosmologiques dans le cadre de la collaboration Planck. Auteure principale de l’article décrivant ces résultats, elle signe là un document clé de référence sur le sujet.
Prix des sciences de l’univers
PRIX PAUL DOISTAU-ÉMILE BLUTET (3000€) Bruno Sicardy
Le prix est décerné à Bruno Sicardy, professeur à la faculté des sciences et ingénierie de Sorbonne université et à l’Observatoire de Paris – PSL au laboratoire d’études spatiales et d’instrumentation en astrophysique (LESIA), pour ses découvertes de l’existence d’anneaux autour d’objets du système solaire (planètes, astéroïdes) par la méthode des occultations stellaires par ces objets, méthode qu’il a initiée et menée à son terme pendant près de 40 ans.
Le réseau mondial d’observateurs permettant ces observations en différents points du globe terrestre a également permis de préciser la taille et la forme de certains astéroïdes.
PRIX LÉON LUTAUD (1500€) Nicolas Mangold
Le prix est décerné à Nicolas Mangold, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique au laboratoire de planétologie et géodynamique à Nantes.
Nicolas Mangold est un géologue internationalement reconnu pour son unique expertise de la géologie de la planète Mars et ses contributions à la révolution scientifique qui a marqué notre compréhension du passé de Mars ces vingt dernières années. Ses nombreux travaux portent aussi bien sur le passé glaciaire récent que sur les ères anciennes marquées par la présence de lacs et de rivières sur la planète rouge. Ils se sont appuyés sur la géomorphologie et la minéralogie observées depuis l’orbite et in situ. Nicolas Mangold a notamment contribué au succès du >Rover Curiosity en participant à son pilotage scientifique et à l’analyse des observations.
PRIX DE CARTOGRAPHIE (1500€) François Chabaux
Le prix est décerné à François Chabaux, professeur à l’université de Strasbourg au laboratoire d’hydrologie et de géochimie à l’École et Observatoire des sciences de la terre de Strasbourg, reconnu et récompensé pour ses travaux originaux de cartographie géochimique dans les bassins versants.
Ses études de la distribution de nombreux éléments, polluants ou non, dans l’Observatoire de la zone critique, dans les sédiments des fleuves et rivières de l’Himalaya et dans les sols du bassin de Paris ont révélé de grandes variations dues aux multiples sources mises en jeu (pluie, neiges et glaces, formations voisines remobilisées).
Ses mesures et modèles ont renouvelé l’étude des mécanismes de dissémination, de piégeage et de remobilisation des polluants dans les sols et les formations sédimentaires.
Prix des applications des sciences à l’industrie
PRIX ADRIEN CONSTANTIN DE MAGNY – Fondation Rheims (5000€) Benoit Noetinger
Le prix est décerné à Benoit Noetinger, directeur de recherche à l’Institut français du pétrole énergies nouvelles à Rueil-Malmaison.
Benoit Noetinger, grâce à des méthodes mathématiques pointues issues de la physique statistique qu’il a développées, a réalisé une oeuvre extrêmement originale en les appliquant aux écoulements de fluides visqueux en milieux poreux ou fissurés. Son travail appliqué aux hydrocarbures conventionnels circulant dans des milieux hétérogènes a eu un retentissement considérable pour le calage des modèles de réservoirs pétroliers utilisés par l’industrie. Ses travaux les plus récents portent sur l’utilisation des outils de simulation de la dynamique moléculaire et des réactions chimiques à l’échelle du pore associée à un calcul d’écoulement hydrodynamique macroscopique. La simulation des milieux nanoporeux est très importante pour modéliser et comprendre les nanomatériaux du futur, appelés à jouer un rôle majeur pour le stockage de l’énergie (hydrogène, électricité etc…) et la génération d’électricité (énergie bleue, osmotique).
Prix sur l’enseignement des sciences
PRIX GEORGES CHARPAK (5000€) Elena Pasquinelli
Le prix est décerné à Elena Pasquinelli, philosophe des sciences, coordinatrice de projets à la Fondation La main à la pâte et chercheuse associée à l’Institut Jean-Nicod.
Élena Pasquinelli est une philosophe, spécialiste de sciences cognitives, qui explore l’impact de ces sciences sur l’enseignement scientifique, l’image de la science que se font professeurs et élèves, leur conception du cerveau et plus largement des neuro-sciences. Auteur de nombreux ouvrages, tant de recherche que de transmission vers les enseignants et un large public, elle est membre du Conseil scientifique du ministre de l’Éducation nationale.