Jeudi dernier, Stanislas GUERINI, Ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, a officialisé l’expérimentation annoncée en mai dernier visant à mettre l’IA générative au service des agents et usagers du service public. Depuis un mois, 1000 agents volontaires de divers services administratifs testent donc un modèle d’IA générative qui les aide à répondre aux avis laissés par les usagers et, selon le ministre, agents comme usagers se déclarent satisfaits.
A cette occasion, Stanislas Guerini a réuni au ministère de la Transformation et de la Fonction publiques des experts en IA générative, des acteurs du secteur privé, notamment les start-ups LightOn, Mistral AI et ReciTAL et du secteur public, afin de discuter des transformations majeures que cette technologie peut induire dans le domaine du travail, de la relation avec les usagers et de son adoption par les administrations.
Il leur a présenté sa stratégie pour anticiper et accompagner le déploiement de l’IA dans la fonction publique, en continuité de la stratégie nationale pour l’intelligence artificielle, avec le soutien du comité de l’intelligence artificielle générative lancé le mois dernier par Elisabeth Borne.
Co-présidé par Philippe Aghion, économiste spécialiste de l’innovation, et Anne Bouverot, Présidente du conseil d’administration de l’ENS, s’appuyant sur l’expertise de Guillaume Avrin, coordonnateur national pour l’intelligence artificielle, ce comité a notamment vocation à fournir des propositions concrètes afin d’adapter cette stratégie.
L’expérimentation de l’IA générative au sein des services publics : un temps de réponse divisé par 2
Mille agents de différents services publics, comme la CNAV (Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse), Pôle Emploi ou l’Assurance Maladie se sont portés portés volontaires pour tester Claude, un modèle d’Anthropic adapté par la start-up française AlloBrain.
Ils font partie des 3500 agents chargés de répondre aux commentaires laissés par les usagers qui ont la possibilité de donner leur avis sur le site Services-publics.fr. Ils ont le choix d’utiliser ou non le modèle pour le faire, dans ce dernier cas, il leur suffit d’appuyer sur un bouton.
Les agents publics jugent alors de la pertinence de la réponse apportée par l’IA, la modifient à leur gré ou décident de ne pas en tenir compte. Les données sont totalement anonymisées, la confidentialité est ainsi complètement préservée pour l’usager.
Pour Stanislas Guerini, il n’est pas question de les remplacer par l’IA, mais de leur permettre de libérer du temps pour avoir plus d’interactions humaines.
À l’issue de la réunion au ministère, il s’est rendu dans une agence de la CNAV pour recueillir directement les retours d’expérience des agents : le modèle d’IA générative permet de réduire par 2 les délais de réponses et dans les deux tiers des cas, les agents estiment utiles les réponses suggérées par l’IA. De plus, les réponses générées par l’IA sont mieux notées que les autres.
Cette expérimentation, menée par la Direction Interministérielle de la Transformation Publique (DITP) et la Direction Interministérielle du Numérique (DINUM), sera élargie, d’ici la fin de l’année, aux agents des maisons France services dans leur accompagnement des usagers au guichet.
Lors d’une interview à Public Sénat, Stanislas GUERINI, explique :
“Il faut que l’on arrête d’opposer l’humanisation de nos services publics et leur numérisation. Je pense que les deux marchent ensemble. Il faut passer moins de temps sur les démarches administratives pour avoir plus de temps d’interactions humaines avec nos concitoyens, pour personnaliser nos services, aller vers ceux qui ont le plus besoin des services publics et qui, parfois, en sont le plus éloignés”.
Albert, un modèle souverain open source spécialisé en interne
Les retours d’expérience des agents de la CNAV ont toutefois souligné que les réponses pouvaient être “ampoulées”, peut-être utiles pour un service client mais moins dans le cadre de l’administration.
Ce dont pourra tenir compte la DINUM qui travaille depuis juin dernier au développement d’un modèle maison, nommé en interne Albert. Selon Ulrich Tan, ingénieur polytechnicien, Chef du pôle Datalab du département Etalab de la Direction, le modèle reposera sur “des briques technologiques, des intelligences artificielles pré-entraînées et disponibles en open source”, comme Llama ou Falcon, qui seront optimisées grâce au fine-tuning pour les besoins des agents du service public. L’outil devrait être proposé à l’ensemble des administrations en 2024.
Renforcer les compétences de l’état dans le numérique
Stanislas GUERINI a entamé, avec l’ensemble du Gouvernement, un chantier de réarmement de la filière numérique de l’Etat. Dès l’année prochaine, 500 postes seront créés dans les métiers du numérique ( data scientists, chefs de produits, designers, experts en IA) afin de retrouver des moyens d’action. En outre, tous les directeurs d’administration vont bénéficier dès cette année d’une formation aux enjeux de la transformation
numérique.