La Commission européenne se penchera sur la législation sur la responsabilité des robots et de l’IA

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La législation européenne actuelle se trouve confrontée à des cas particuliers avec le développement des nouvelles technologies. C’est ce que confirme un nouveau rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité Économique et Social européen publié le 7 mai dernier sur l’application de la directive 85/374/CEE du Conseil relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux.

“2018 n’est pas 1985. L’UE et ses règles en matière de sécurité des produits ont évolué, tout comme l’économie et les technologies. De nombreux produits disponibles aujourd’hui ont des caractéristiques qui, dans les années 80, relevaient de la science-fiction. Les défis qui se posent aujourd’hui et auxquels nous serons de plus en plus confrontés ont trait à la numérisation, à l’internet des objets, à l’intelligence artificielle(IA) ou à la cybersécurité, pour ne citer que quelques exemples.

La croissance exponentielle de la puissance des ordinateurs, la disponibilité des données et les progrès réalisés dans le domaine des algorithmes font de l’IA surtout une des technologies les plus importantes du XXIe siècle. La Commission a adopté unecommunication intitulée «Maximiser les retombées positives de l’intelligence artificielle pour l’Europe» afin d’apporter une réponse stratégique cohérente traitant aussi des questions juridiques. La sécurité des produits et la responsabilité du fait des produits en cas de dommage constituent des éléments essentiels dans la recherche d’une action stratégique qui permette aux sociétés, aux entreprises et aux consommateurs européens de tirer parti de l’IA.”

Les entreprises technologiques s’inquiétaient de possibles modifications des règles européennes. Plusieurs courants demandent en effet à la Commission européenne d’augmenter la responsabilité juridique des créateurs de robots et d’IA en cas de défaut. L’organisme a pris en compte les interrogations et craintes exprimées et a annoncé des consultations.

“Quant aux nouvelles technologies numériques, l’analyse préliminaire de leur effet sur le fonctionnement de la directive a permis de soulever un certain nombre d’interrogations. À la lumière de ces résultats, la Commission procédera à de larges consultations afin d’établir une interprétation commune avec l’ensemble des parties prenantes. L’objectif sera d’élaborer des orientations détaillées sur la manière dont il convient aujourd’hui d’appliquer la directive. De plus, il s’agira de déterminer dans quelle mesure la directive actuelle s’avère appropriée pour traiter des nouvelles technologies numériques. Ces orientations et l’évaluation nous aideront à préparer le terrain pour la mise en place d’un cadre en matière de responsabilité du fait des produits en phase avec la révolution industrielle numérique.”

Actuellement, les entreprises restent responsables en cas de défaut d’un de leurs produits. Cette responsabilité implique une indemnisation du consommateur en cas de plainte. Cependant, le cas de technologies en développement est assez particulier et un groupe d’experts a été nommé par la Commission européenne pour analyser en détail la législation. La directive actuelle pourrait donc être modifiée en fonction des conclusions d’un prochain document consacré aux technologies émergentes autonomes qui devrait être présenté d’ici la mi-2019.

“Pour ce qui est des nouvelles technologies, il est impossible d’émettre des conclusions définitives faute d’information sur des affaires en justice concrètes, des plaintes de consommateurs ou des expériences pratiques pertinentes rapportées par les parties prenantes. Compte tenu des caractéristiques de ces technologies (notamment leur complexité et leur autonomie), il est clair que la Commission devra assurer un suivi des questions en suspens. Certaines de ces caractéristiques mettront peut-être à l’épreuve la capacité du cadre actuel de responsabilité du fait des produits à garantir un moyen de recours efficace pour les consommateurs et une stabilité des investissements pour les entreprises, tandis que d’autres se prêteront à l’application de la directive actuelle. La Commission suivra de près les problèmes potentiels après la publication du présent rapport.”

“La directive a bien supporté trois décennies d’innovations techniques. Ses objectifs de départ, à savoir garantir la responsabilité du producteur, la protection des consommateurs et une concurrence non faussée, demeurent d’actualité. Cependant, s’agissant des dernières évolutions technologiques, les parties prenantes ont fait part de leurs préoccupations quant à la pertinence à long terme des concepts de la directive tels qu’ils sont énoncés actuellement.

La distinction entre produit et service (pour l’internet des objets, par exemple, lorsque produit et service interagissent), le champ des dommages couverts (actuellement limité aux dommages matériels) et la définition de ce qui constitue un défaut font débat. […]

Le monde numérique d’aujourd’hui soulève des problèmes quelque peu différents de ceux auxquels nous étions confrontés dans le monde essentiellement analogique de 1985. Nous vivons une nouvelle révolution technologique. L’économie et les produits eux- mêmes sont de plus en plus interconnectés, numériques, autonomes et intelligents. Nous avons besoin d’une réponse cohérente et globale à ces défis, comme indiqué dans l’initiative sur l’IA.

La directive a jusqu’à présent couvert un large éventail de produits et d’évolutions technologiques. Dans son principe, elle est un instrument utile pour protéger les personnes lésées et préserver la concurrence dans le marché unique, grâce à l’harmonisation dans les domaines concernés des règles qui s’appliquent aux personnes lésées et aux entreprises. Or, en la matière, des règles au niveau de l’UE apportent une valeur ajoutée manifeste. Personne ne remet en question la nécessité de règles au niveau de l’UE en matière de responsabilité du fait des produits.
Cela ne signifie pas pour autant que la directive est parfaite.

La directive pourrait être plus efficace dans l’application concrète de certains de ses concepts («produit», «producteur», «défaut», et «dommage» par exemple, ou la charge de la preuve). L’évaluation a aussi révélé que, dans certains cas, les coûts ne sont pas répartis équitablement entre les consommateurs et les producteurs. Cette disparité s’observe surtout lorsque la charge de la preuve est complexe, par exemple dans certains cas impliquant des nouvelles technologies numériques ou des produits pharmaceutiques. […]

Le rôle de la Commission européenne est de mettre en place un cadre positif et fiable de la responsabilité du fait des produits, qui favorise l’innovation, l’emploi et la croissance tout en protégeant les consommateurs et la sécurité du grand public. Nous publierons, à la mi-2019, des orientations sur la directive, ainsi qu’un rapport faisant état des répercussions plus larges de l’IA, de l’internet des objets et de la robotique sur les cadres de responsabilité et de sécurité, de leurs éventuelles lacunes et des lignes directrices pour les combler. Si nécessaire, nous mettrons à jour certains aspects de la directive, tels que les concepts de «défaut», de «dommage», de «produit» et de «producteur». Par contre, nous ne reviendrons pas sur le principe général de la responsabilité stricte du producteur.

Avec un cadre de sécurité cohérent et neutre du point de vue technologique, nous devrions prévenir les accidents autant qu’il est possible. Si malgré tout des accidents se produisent, notre cadre en matière de responsabilité du fait des produits devrait garantir l’indemnisation des personnes ayant subi un dommage.”

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