Le Ministère du Commerce chinois a annoncé ce lundi 3 juillet des mesures pour restreindre ses exportations de gallium et germanium – deux métaux importants dans la fabrication de semi-conducteurs. Cette décision survient après l’annonce de nouvelles restrictions de l’exportation de puces des USA vers la Chine, de nouvelles règles limitant les exportations de certains équipements de semi-conducteurs imposées par le gouvernement néerlandais et alors que l’UE cherche à réduire sa dépendance à l’égard de la Chine dans ce domaine.
Tout comme les USA ou les Pays-Bas l’ont fait auparavant, la Chine dit mettre en place ces restrictions pour des raisons de sécurité nationale. Elles entraîneront une obligation pour les exportateurs de demander une licence à partir du 1er août prochain afin d’expédier certains composés de gallium et de germanium. Les demandes de licences d’exportation devront fournir des informations sur les importateurs et les utilisateurs finaux, et préciser l’usage prévu de ces métaux.
Le gallium est un métal rare et malléable, de couleur argentée brillante à température ambiante. Il possède plusieurs propriétés intéressantes : il est très conducteur d’électricité et a une faible résistance électrique, ce qui le rend utile dans les applications électroniques, notamment pour la fabrication de semi-conducteurs et de diodes. Il est utilisé dans les cellules solaires, les écrans à cristaux liquides, les lasers et les semi-conducteurs à base de gallium nitride pour l’éclairage à LED.
Il est par ailleurs utilisé en médecine, notamment dans les radioisotopes de gallium utilisés pour le diagnostic de certaines maladies, comme les tumeurs cancéreuses et les infections inflammatoires.
Le germanium est quant à lui un semi-conducteur grisâtre qui présente des propriétés similaires à celles du silicium, mais avec une conductivité électrique légèrement supérieure. Il est souvent utilisé dans la fabrication de dispositifs électroniques tels que les transistors, les diodes, les cellules solaires, mais également dans les technologies infrarouges, les détecteurs de rayonnement et les amplificateurs à semi-conducteurs à haute fréquence.
La Chine produit à elle seule 80% de ces métaux, tous deux font partie des matières premières considérées comme critiques par la Commission européenne.
La guerre technologique et économique des semi-conducteurs
Ce mardi 4 juillet, le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Mao Ning, a précisé, lors d’une conférence de presse à Pékin, que ces contrôles à l’exportation étaient conformes à la loi et ne visaient aucun pays en particulier.
Cependant, il semble clair que les Etats-Unis et l’UE, le Japon sont visés puisque selon le NBS (le National Bureau of Statistics de la Chine), en 2022, les premiers importateurs de gallium produit en Chine étaient le Japon, l’Allemagne et les Pays-Bas et pour le germanium le Japon, la France, l’Allemagne et les États-Unis.
La position de l’UE
Ce mardi 4 juillet, le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Mao Ning, a précisé, lors d’une conférence de presse à Pékin, que ces contrôles à l’exportation étaient conformes à la loi et ne visaient aucun pays en particulier.
L’UE veut diversifier ses sources d’approvisionnement pour ne plus être à la merci d’autres pays.
Le règlement européen sur les matières premières critiques (CRMA), dont l’objectif est de garantir un approvisionnement sûr et durable en matières premières critiques, limite à 65% la provenance de minéraux en provenance d’un seul pays tiers d’ici 2030. Il propose d’identifier les projets stratégiques au sein de l’union dans les domaines de l’extraction, de la transformation ou du recyclage de matières premières stratégiques afin qu’au moins 40% des matières premières essentielles dont l’UE a besoin y soient traitées. Des partenariats avec d’autres pays apporteront les 60% manquants.
Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur, est actuellement au Japon dans le but d’étendre la coopération UE/Japon dans le domaine des puces et de l’IA ainsi que pour les chaînes d’approvisionnement, il en a fait de même en Corée du Sud la semaine dernière.
Si l’UE cherche à réduire sa dépendance vis à vis de la Chine, elle ne vise cependant pas à cesser tout commerce avec cette dernière.
Selon l’agence de presse Yonhap, Thierry Breton a déclaré lors d’une interview le 30 juin dernier, évoquant la décision d’interdire à Huawei d’accéder aux réseaux 5G de ses Etats membres :
“Notre stratégie n’était pas du tout de nous découpler de la Chine, mais de réduire les risques dans certains domaines où nous pouvions avoir trop de dépendance avec une source unique”.
ajoutant :
“La Chine est et continuera à être un partenaire commercial important”.
Un simple avertissement ?
Selon CNBC, les analystes d’Eurasia Group, Anna Ashton, Xiaomeng Lu et Scott Young ont déclaré dans une note :
“Cette décision aura un impact limité sur l’offre mondiale compte tenu de la portée ciblée”.
Ils auraient ajouté :
“C’est un coup de semonce destiné à rappeler à des pays comme les Etats-Unis, le Japon et les Pays-Bas que la Chine a des options de rétorsion et à les dissuader ainsi d’imposer de nouvelles restrictions à l’accès chinois aux puces et outils haut de gamme”.