A l’instar de nombreux autres pays, la Belgique entend profiter pleinement des opportunités offertes par l’IA. Afin d’en devenir un leader européen, elle s’est dotée du « Plan national de convergence pour le développement de l’intelligence artificielle (IA) », qui a été approuvé lors du Conseil des Ministres le 28 octobre dernier et propose des actions concrètes pour faire de la Belgique une #SmartAINation.
La Belgique compte trois régions: la Région flamande, la Région de Bruxelles-Capitale et la Région wallonne. Celles-ci ont déjà fait approuver par leur gouvernement des plans ambitieux en matière d’IA, qu’ils réalisent actuellement. Plusieurs instituts, comme le FARI à Bruxelles, ont été créés pour soutenir des projets d’envergure dans le cadre des priorités territoriales, des programmes comme le projet DigitalWallonia4.ai ont été mis en place, des initiatives comme AI4Belgium ont vu le jour.
Etant donné les enjeux sociétaux, les défis à relever et la multiplicité des acteurs concernés, l’intégration du potentiel de l’IA à l’échelle nationale belge ne peut se faire qu’en synergie avec les entités fédérées.
Le plan national de convergence pour le développement de l’IA
Le plan est organisé autour de neuf objectifs, retient 70 d’axes d’action s’appuyant sur des enveloppes budgétaires déjà existantes.
Objectif n°1 : Promouvoir une IA digne de confiance
Bien que la majorité des citoyens belges pensent que l’IA peut contribuer à améliorer la société, des craintes subsistent quant à son utilisation : une communication pédagogique est nécessaire pour expliquer ces technologies, leur utilisation et leur impact. D’autre part, un cadre éthique et juridique garantissant la conception, le développement, le déploiement et l’utilisation responsables de ces technologies doit être mis en place.
Le plan envisage également l’adoption d’un cadre de gouvernance de l’utilisation de l’IA dans les services publics fédéraux, dont la mise en place d’un comité d’avis sur l’utilisation éthique de l’IA dans le fonctionnement des services publics.
Il vise aussi à développer des outils pour accompagner les utilisateurs des systèmes d’IA, à identifier les biais algorithmiques et lutter contre les formes de discrimination grâce aux outils numériques spécialisés et à contribuer activement aux développements de normes, standards et recommandations au sein des enceintes internationales.
Objectif n°2 : Garantir la cybersécurité
Les systèmes d’IA traitent de grandes quantités de données sensibles et prennent des décisions importantes : toutes les étapes de la chaîne de traitement des données, depuis
l’acquisition des données, la formation et la mise à jour des modèles, jusqu’au processus de décision automatisé doit être protégé.
Parmi les axes d’action, le plan veillera à la cohérence entre les politiques d’IA, de la cybersécurité et de la vie privée, réalisera une cartographie des applications d’IA pour la cybersécurité, recrutera et développera des talents locaux au sein d’une culture de start-ups.
Objectif n°3 : Renforcer la compétitivité et l’attractivité de la Belgique grâce à l’IA
Le taux d’adoption de l’IA en Belgique est estimé entre 20 à 25%. Le Digital Compass de la Commission européenne publié en mars 2021, fixe le taux d’adoption des technologies cloud/big data/IA à 75% à l’horizon 2030. Il est donc crucial de stimuler l’adoption de l’IA par les entreprises, faciliter la recherche et le transfert de technologies.
Les axes d’action pour ce 3éme objectif sont entre autres d’intensifier les initiatives d’information et de soutien aux PME en matière d’IA en impliquant les centres de recherche, de mettre en place une politique incitative et volontariste pour retenir les meilleurs chercheurs en IA, de mettre en place un cadre réglementaire permettant l’utilisation de « bacs à sable/sandboxes » afin de permettre aux entreprises d’expérimenter les applications d’IA.
Objectif n°4 : Développer une économie basée sur les données et une infrastructure performante
Après un rappel des réglementations européennes en matière de données, le plan souligne l’importance des open data, notamment de la réutilisation des données des services publics. Cette stratégie doit être soutenue par des infrastructure de haute qualité, que ce soit dans des datacenters ou dans le cloud.
Le plan vise notamment à encourager les entreprises et les institutions de la connaissance à ouvrir leurs infrastructures et leurs données aux entrepreneurs et aux PME pour développer de nouvelles solutions IA, à améliorer l’accès aux services cloud, à renforcer le développement d’une infrastructure IA compétitive nationale et européenne, qui puisse activer l’IA chez tous les intervenants, y compris les services publics, les PMEs, les start-ups, la recherche et la formation.
Objectif n°5 : L’IA au cœur de la santé
Dans le domaine biotech et pharmaceutique, la Belgique a une place de leader. Au cours des 10 dernières années, les dépenses en R&D ont progressé de 166%, passant d’1,9 milliard en 2010 à plus de 5 milliards en 2020. Alors que l’IA accélère à pleine vitesse dans ce secteur et change la façon dont les thérapies sont mises au point, la capacité de la Belgique à développer son expertise en IA dans ce domaine sera cruciale.
Parmi la liste d’actions, on trouve l’accompagnement des établissements de soins lors de la mise en place de technologies à haute valeur ajoutées ( chirurgie robotique, aide au diagnostic, normalisation des protocoles…), la formation des professionnels de la santé et de la technologie dédiée à la santé mais aussi la formation continue pour les professionnels déjà actifs.
Le plan prévoit également d’adopter une gouvernance efficace des données médicales et d’étudier la mise en place d’une plateforme de régulation de l’IA en médecine qui
puisse réviser les solutions technologiques via des procédures appropriées et
surveiller les solutions approuvées une fois déployées.
Objectif n°6 : Au service d’une mobilité plus durable
Au niveau mondial, la demande en transport urbain de voyageurs aura plus que doublé entre 2015 et 2050, les transports de marchandises augmenteront de façon similaire.
Cette augmentation impacte d’ores et déjà la qualité de vie et accélère le changement climatique. Il est nécessaire de mettre en place une politique de mobilité volontariste, orientée vers une mobilité plus durable.
Le plan préconise d’élaborer et de mettre en œuvre une vision nationale du « Mobility as a Service » (Maas) et développer les bases d’une approche « Logistic as a Service » (LaaS) ;
toutes deux en concertation avec les Régions, d’explorer les potentialités de l’IA pour renforcer la sécurité routière, optimiser la logistique, accompagner et orienter la transition vers une mobilité plus efficiente, sûre, inclusive et durable.
Objectif n°7 : Préserver l’environnement
L’IA peut aider à résoudre certains problèmes environnementaux mais est aussi énergivore. On estime que d’ici à 2025 les serveurs qui lui sont dédiés consommeront à eux seuls 10% de l’énergie électrique mondiale.
Le plan permettra entre autres de développer l’infrastructure belge de calcul et de stockage pour permettre aux différents acteurs de tester leurs approches sans pour autant sortir des données du pays, il veillera à ce que l’IA contribue à une économie circulaire et à ce que son utilisation de l’IA n’entraîne pas une augmentation de l’empreinte écologique.
Objectif n°8 : Former mieux et tout au long de la vie
L’IA impactera le marché du travail. Avec l’automatisation, de nombreux emplois vont disparaître, mais d’autres seront créés.
Il faudra donc créer un cadre pour la mise à niveau des compétences, le recyclage et le développement des compétences de base en matière d’IA, afin de transformer ou d’améliorer globalement les compétences des personnes grâce à des formations adéquates. Le plan prévoit également de renforcer les programmes d’apprentissage continu dispensés par les établissements d’enseignement, … en vue d’un programme de formation continue (“Adults Reskilling Program”).
Par ailleurs, un cycle New Learning Deal d’ateliers de prospective, appelé « Bright Mirrors », sur le futur du travail dans ses différents aspects (tant sur les besoins, les défis, les dangers, les opportunités, au niveau individuel et sociétal) sera organisé.
Objectif n°9 : Fournir aux citoyens de meilleurs services et une meilleure protection
Ce plan national vise à positionner la fonction publique comme acteur de l’IA, en plaçant au cœur des réflexions le citoyen et les agents du secteur public, notamment avec une politique sociale performante pilotée par l’IA.
Il est donc nécessaire de cerner les besoins des citoyens, favoriser l’acceptabilité sociale de l’IA, le développement de services publics centrés sur l’humain et renforcer les compétences en IA des agents administratifs.
Il faudra, d’autre part, développer des applications d’IA pour garantir les droits sociaux des citoyens, renforcer l’accessibilité de la protection sociale et lutter contre le non-recours à celle-ci ainsi que pour soutenir le traitement et les contrôles dans les processus administratifs du secteur de la protection sociale.