Florence Parly, la ministre des Armées, a inauguré le 3 octobre à Rennes le premier bâtiment du commandement de la cyberdéfense du ministère des Armées (ComCyber). Ses 11 000m2 abriteront, après 26 mois de travaux et pour un coût de 44 millions d’euros, 400 cyber-combattants.
La ministre a également profité de sa visite pour inaugurer la Cyberdéfense Factory. Il s’agit de l’antenne bretonne de l’Innovation Défense Lab.
« Ce lieu d’échanges servira à créer des synergies entre l’État, les industriels et les start-up, et à capter de l’innovation dans le domaine de la cyber. Il sera aussi un incubateur technologique ».
Lors de sa visite, Florence Parly a prononcé un discours rappelant l’importance de la technologie dans la stratégie de défense nationale. Voici quelques extraits de sa prise de parole :
« Un centre de commandement des opérations privé de moyens de communication. Notre industrie de défense à l’arrêt. Des sites gouvernementaux affichant des messages haineux en guise de page d’accueil. Des drones à la trajectoire manipulée et détournée. Tels pourraient être les méfaits de cyberattaques massives. Et dans l’obscurité de ce qu’elles pourraient engendrer, subsiste une lueur brillante et persistante ; celle de notre armée de cybercombattantes et de cybercombattants sur le pied de guerre, prête à détecter, attribuer, contrer ces attaques.
Alors, non, je n’ai pas l’intention de donner des idées aux scénaristes de Black Mirror, pas plus que je n’ai l’intention d’avoir un discours anxiogène sur les conséquences possibles d’une cyberattaque majeure. Au contraire, imaginer ces situations, anticiper les effets que pourraient avoir ce que les spécialistes appellent depuis quelques années un « Cyber Pearl-Harbor », c’est justement se mettre en ordre de bataille pour l’empêcher. Et le ministère des Armées est prêt. Nos armées, la Direction générale de l’armement, la DGSE et notre outil industriel de défense sont prêts à faire face à ces nouvelles menaces, à garantir notre souveraineté nationale, en lien étroit avec l’ensemble des autres acteurs concernés, au premier rang desquels je voudrais bien sûr citer l’ANSSI, l’agence nationale de la sécurité des systèmes d’information.
[…]
Car vous le savez, la cyberdéfense est une priorité absolue du ministère des Armées. Nous investissons beaucoup, nous recrutons à un rythme soutenu, nous consolidons nos pôles d’expertise dans les armées, à la DGA et à la DGSE avec l’ambition de donner à la France les moyens de construire une cyberdéfense à la hauteur de ses ambitions opérationnelles et de faire de la France un acteur incontournable de la cybersécurité.
Et si je suis aujourd’hui à Rennes, c’est parce que c’est ici que se concrétise une grande partie des efforts qui est réalisée pour bâtir notre cyberdéfense. Je commencerai par un chiffre : d’ici 2025, nous aurons une armée de 4 000 cybercombattants, soit 1 000 de plus qu’aujourd’hui. Sur ce millier de recrutements, 800 seront opérés dans le bassin rennais.
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Et je suis très heureuse d’inaugurer aujourd’hui, au cœur de cet environnement unique le premier bâtiment entièrement dédié à la conduite des opérations cyber. Ce bâtiment, nous avons choisi de le baptiser en hommage au commandant Roger Baudouin, l’un des premiers et des meilleurs cryptographes de l’armée française, celui qui a formé Alan Turing à la cryptologie. Ce même Alan Turing, qui déchiffra la machine Enigma, conférant ainsi aux Alliés un avantage considérable durant la Seconde Guerre mondiale. Je porte l’espoir que l’histoire du commandant Baudoin inspire nos cybercombattants et toutes les personnes qui entreront dans ce bâtiment, temple de la cyberdéfense, contenant, je vous le livre pour l’anecdote, plus de 200 kilomètres de câbles informatiques.
Et ce n’est que le début. Car ce bâtiment n’est que le premier. Conformément aux engagements de la loi de programmation militaire, deux nouveaux bâtiments permettront au Comcyber de disposer d’un outil redoutable de planification et de conduite des opérations dans le cyberspace. Ces moyens qui placent la France à l’avant-garde des opérations sont la traduction concrète de l’élan du ministère en matière de cyber. Ils illustrent aussi notre volonté de nourrir l’ambition cyber qui prévaut ici, à Rennes.
[…]
Et nous ne sommes plus au stade de la théorie. C’est une réalité qui prend corps, notamment dans la Cyberdéfense factory que j’aurai l’honneur d’inaugurer tout à l’heure, à quelques centaines de mètres d’ici. Cette antenne de l’Innovation Défense Lab est un espace unique qui accueillera des startups, des PME et des chercheurs pour travailler en étroite relation avec des experts de la Direction générale de l’armement sur des sujets de cybersécurité. C’est un lieu de partage des compétences mais aussi de partage des données : le Comcyber apportera aux acteurs de la Cyberdéfense Factory sa parfaite connaissance de l’environnement opérationnel, notamment dans l’élaboration et le partage de bases de données suffisamment représentatives de l’environnement opérationnel réel. Nous le savons, les spécialistes en intelligence artificielle le disent : l’accès aux données est un facteur décisif du succès.
[…]
Car j’ai le plaisir d’annoncer la signature d’une convention entre le ministère des Armées et la société d’investissement ACE Management pour accélérer les financements dans le domaine du cyber grâce à un fonds de 80 millions d’euros entièrement dédié à la cybersécurité.
[…]
Une fabrique de champions cyber, voilà ce que nous créons aujourd’hui. Et vous serez ceux qui allez la porter. Vous êtes chercheurs, ingénieurs, techniciens et tous unis par cette même volonté d’exceller dans le cyber. Cette quête du sommet, cette ardeur à l’effort, c’est le moteur de notre défense. C’est avec cette énergie, avec votre expertise et vos talents que nous pourrons construire une cyberdéfense à la hauteur, pour développer et, quand il le faut, employer nos armes cyber offensives. Pour protéger nos systèmes, nos concitoyens et nos valeurs.
Le monde sait aujourd’hui qu’il faudra compter avec nous, dans le cyber, comme dans l’espace ou dans le champ de l’intelligence artificielle. Il le sait grâce à vous tous ; grâce à vous qui faites rayonner la France, vous qui faites de notre pays une cyber-puissance. »