Le Digital Education Council a interrogé plus de 3800 étudiants de l’enseignement supérieur dans 16 pays afin d’appréhender leur point de vue sur l’IA dans l’éducation. Selon cette enquête, l’IA est désormais perçue comme une composante indispensable des études universitaires, bien que des défis subsistent quant à son intégration efficace.
Utilisation de l’IA : une adoption massive
Avec 86 % des étudiants déclarant utiliser l’IA dans leurs études, et plus de la moitié (54 %) y ayant recours chaque semaine, l’adoption de l’IA dans l’enseignement supérieur est en pleine expansion. ChatGPT se positionne comme l’outil le plus utilisé, avec 66 % des étudiants l’employant principalement pour rechercher des informations et résumer des documents. Grammarly et Microsoft Copilot sont tous deux utilisés par 25 % des étudiants sondés, Claude AI, Blackbox, Gemini ou DeepL font également partie des outils d’IA auxquels les étudiants ont recours.
Chaque étudiant s’appuie sur une moyenne de 2,1 applications d’IA dans le cadre de ses études, 22 % en utilisant plus de trois.
Cependant, malgré cette adoption généralisée, 58 % des étudiants estiment ne pas avoir les compétences nécessaires pour bien comprendre et utiliser l’IA. De plus, près de 50 % d’entre eux se disent mal préparés pour évoluer dans un environnement professionnel dominé par l’IA.
Défis et inquiétudes des étudiants
80 % des étudiants jugent que l’intégration dans leur université est encore insuffisante. Des préoccupations émergent autour de la confidentialité des données, de la fiabilité du contenu généré par IA, ce qui peut sembler paradoxal vu l’augmentation de leur propre utilisation de l’IA, et surtout, de l’équité des évaluations automatisées. En effet, environ 60 % des étudiants craignent que l’utilisation de l’IA par les enseignants pour évaluer leurs travaux ne soit pas toujours équitable.
Un besoin urgent de formation et de directives
L’enquête révèle que seulement 5 % des étudiants considèrent que les lignes directrices concernant l’usage de l’IA dans leurs établissements sont à la fois claires et complètes. Alessandro Di Lullo, PDG du Conseil de l’Éducation Numérique et chercheur universitaire en gouvernance de l’IA à l’Université de Hong Kong, souligne que la mise à jour des lignes directrices et leur communication claire est une priorité urgente. Le cadre de gouvernance de l’IA proposé par le DEC en juin 2024 est un outil clé pour les universités cherchant à améliorer la littératie en IA.
En parallèle, Daniel Bielik, président du DEC, met en lumière la nécessité de cas d’usage « disruptifs » pour l’IA dans l’éducation. Il anticipe une transformation sociétale en profondeur à mesure que l’IA continue de s’intégrer dans le quotidien des étudiants. Toutefois, il avertit que pour saisir pleinement cette opportunité, les universités devront non seulement adopter l’IA mais aussi équilibrer son utilisation pour ne pas en faire une béquille.
Redéfinir les rôles des établissements d’enseignement supérieur
Alors que l’IA devient de plus en plus centrale dans les études universitaires, les établissements d’enseignement supérieur doivent évoluer pour répondre aux attentes des étudiants. Il ne s’agit plus simplement d’intégrer l’IA dans le programme d’études, mais de faire de cette technologie un élément fondamental de l’infrastructure éducative, permettant aux étudiants de développer des compétences adaptées au marché du travail.
Alexandro Di Lullo insiste sur l’importance pour les universités de promouvoir une culture de l’innovation en IA, tant chez les étudiants que chez le corps professoral. La création de centres spécialisés pour l’enseignement et la recherche en IA pourrait aider à combler les lacunes identifiées dans l’enquête. Ces centres offriraient des opportunités de développement professionnel continu pour les professeurs, les aidant à intégrer l’IA dans leurs méthodes d’enseignement de manière plus innovante et efficiente.
Vers un avenir axé sur l’IA
L’intégration réussie de l’IA dans l’éducation repose sur l’équilibre entre son adoption et sa régulation. Alors que l’IA offre des avantages indéniables, tels que la facilitation de la recherche, la vérification grammaticale et la génération de contenus, elle présente également des défis en matière de dépendance et d’équité.
Les universités qui sauront anticiper ces défis, en s’assurant que l’IA soutient plutôt que remplace la pensée critique et les explorations intellectuelles, auront un rôle de premier plan dans la préparation des étudiants à un avenir de plus en plus automatisé. Daniel Bielik rappelle que l’IA est sur le point de provoquer des transformations profondes, et que les institutions doivent se préparer à ces bouleversements pour rester à la pointe de l’innovation éducative.
L’enquête mondiale DEC 2024 est disponible ici.