De nombreuses études sont menées tout au long de la scolarité des élèves, certaines se rapportent à la réussite scolaire des filles et leurs différences d’orientation par rapport aux garçons à leur arrivée au lycée. Celle menée par le Centre francilien Hubertine Auclert a pour objectif de mettre en évidence les freins à l’orientation des filles vers les filières scientifiques en général, et plus particulièrement dans les filières numériques et informatiques.
L’égalité entre les femmes et les hommes est un principe constitutionnel. Si l’école a joué un grand rôle dans l’émancipation des femmes, malgré des résultats scolaires supérieurs à ceux des garçons, les filles sont insuffisamment présentes dans les filières scientifiques, industrielles et numériques. Les stéréotypes genrés perdurent à tel point que Claude Roiron, la déléguée ministérielle à l’égalité filles-garçons, a déclaré l’an passé :
« Nous allons proposer aux élèves boursiers de seconde une sorte de bonification de leur allocation qui pourrait aller jusqu’à plusieurs dizaines d’euros par mois s’ils choisissent un enseignement de spécialité en première où ils sont minoritaires en genre. Exemple, la philosophie et la littérature pour les garçons, les sciences de l’ingénieur pour les filles ou le numérique…Cette bonification pourrait être doublée en classe de terminale si l’enseignement est conservé. Les arbitrages sur le montant de l’enveloppe sont en cours. »
L’étude du Centre Hubertine Auclert
Créé en 2009, associé à la région Ile-de-France, Le Centre Hubertine Auclert (du nom de la sufragette, qui a notamment milité pour les droits politiques des femmes) contribue à la lutte contre les inégalités et les discriminations fondées sur le sexe et le genre et promeut l’égalité femmes-hommes.
L’une de ses missions est de « Promouvoir l’éducation à l’égalité, notamment via la réalisation d’études et d’analyses des représentations sexuées et sexistes dans les outils éducatifs. »
Elle a mené une étude de 2018 à 2021 dans cinq lycées franciliens qu’elle a intitulée:
« Les freins à l’accès des filles aux filières informatiques et numériques. »
L’informatique, un monde d’hommes ?
Le nombre des étudiantes en informatique a baissé depuis les années 1980, pourtant elle représentait une réelle opportunité pour accéder au métier d’ingénieur(e). Ainsi, à l’INSA, à Rennes, alors que la mixité filles-garçons était parfaite en 1980, en 2015, la proportion des femmes n’était plus que de 14%.
A la rentrée 2017, on ne comptait plus que 8% de femmes dans la filière. En 2018, les femmes représentaient 33 % des salarié·es des secteurs informatiques et numériques, mais 75 % d’entre elles occupaient des postes « support » (ressources humaines, administration, marketing, communication) et seulement 15 % des fonctions dites techniques (exploitation, développement, production, gestion de projets).
La déféminisation du secteur coïnciderait avec l’apparition de l’ordinateur dans les foyers, et de l’imaginaire geek, associé aux garçons.
Peu d’intérêt pour les filières informatiques et numériques
Les élèves, filles comme garçons, montrent un grand désintérêt pour les filières informatiques et numériques. Ils ont l’image d’un geek associal, peu doué pour les relations sociales, toujours devant son écran, et, pour les garçons, complètement décalé par rapport à l’image de la virilité qu’ils ont (sport, musculation, armée…)
Le lycée accentue les inégalités de genre
Les équipes éducatives ne peuvent pas enrayer la production d’inégalités au lycée voire participent à les renforcer. Les filles se sentent moins compétentes, sont plus nombreuses que les garçons à abandonner d’autant plus qu’elles ne sont pas soutenues.
Ainsi, le membre d’une équipe de direction a déclaré aux enquêteurs :
« Dans le lycée actuel, celles qui réussissent le mieux en filière scientifique sont plutôt des filles laborieuses, on a quelques garçons laborieux mais la plupart du temps les garçons qui réussissent sont des garçons qui naturellement ont une appétence pour les sciences. Ce sont des garçons qui fonctionnent très vite intellectuellement et qui eux ont beaucoup moins besoin de travailler. »
Conclusions de l’étude
L’étude a permis de formuler différentes recommandations :
- Augmenter la part de filles choisissant et se maintenant dans les enseignements scientifiques et numériques ;
- Améliorer l’accompagnement des élèves dans leur processus d’orientation ;
- Mieux prendre en compte et former les professionnel·les aux enjeux liés aux inégalités et aux stéréotypes de genre, dans l’enseignement et dans l’accompagnement des jeunes au cours de leur scolarité.
Il est à noter que ces recommandations sont complémentaires du plan d’action proposé
dans le rapport « Faire de l’égalité filles-garçons une nouvelle étape dans la mise en œuvre du lycée du xxième siècle » remis à Jean-Michel Blanquer, alors Ministre de l’Éducation Nationale, en juillet 2021.
Sources : Centre Hubertine Aubert
Etude : LES FREINS À L’ACCÈS DES FILLES AUX FILIÈRES INFORMATIQUES ET NUMERIQUES