Des chercheurs de l’Institut Pasteur lancent une plateforme ouverte de partage de données de microscopie super-résolutive

Microscope

Des chercheurs de l’Unité Imagerie et Modélisation à l’Institut Pasteur, dirigée par Christophe Zimmer, proposent ShareLoc.XYZ, une plateforme ouverte pour le partage de données et d’outils de microscopie de localisation de molécule unique. Elle permettra l’accès à de grandes collections d’images produites par microscopie super-résolutive et grâce à l’accumulation progressive des données, permettra d’entrainer un algorithme de deep learning, notamment pour accélérer l’imagerie super-résolutive.

La microscopie super-résolutive à localisation de molécule unique (SMLM : Single Molecule Localization Microscopy) permet d’atteindre une résolution allant jusqu’à 20 nm, soit environ dix fois mieux que la microscopie optique classique.

Christophe Zimmer explique :

« Les microscopes optiques classiques permettent de distinguer des structures de l’ordre de 200 à 300 nm, mais pas en deçà. Les objets plus petits apparaissent comme une tache de lumière au microscope, on ne peut pas distinguer leur structure interne. C’est le cas par exemple de la capside du virus du sida, qui a une forme de cône, ou des pores nucléaires, qui ont une forme d’octogone. Dans les deux cas, avec un microscope classique on ne voit qu’une tache diffuse ».

La SMLM est très utilisée en biologie, mais la plupart des images produites ne sont pas partagées avec la communauté scientifique, pourtant elles permettraient d’entraîner des algorithmes notamment pour accélérer l’imagerie super-résolutive ou analyser des structures moléculaires. Pour pallier à ce problème, Christophe Zimmer et son équipe proposent donc une plateforme permettant de regrouper toutes les images produites par la microscopie SMLM.

Accélérer la SMLM grâce au deep learning

La vitesse des méthodes de SMLM par exemple, PALM et STORM, est limitée par la nécessité d’acquérir jusqu’à des dizaines de milliers d’images de résolution classique pour obtenir une seule image super-résolutive. Pour y remédier, Christophe Zimmer et son équipe de l’unité Imagerie et modélisation à l’Institut Pasteur, avaient, en 2018, développé en 2018 la méthode ANNAPALM. Elle utilise le deep learning pour reconstruire des images SMLM à partir d’images de localisation clairsemées et rapidement acquises et /ou d’images à grand champ en un temps beaucoup plus court que dans la microscopie super-résolutive classique. Tellement que « nous avons à l’époque accéléré l’imagerie super-résolutive des microtubules d’environ 100 fois », explique Christophe Zimmer.

De la nécessité du partage des données

Pour qu’un algorithme de deep learning soit performant, il doit être entraîné sur de grandes quantités de données très variées. Cependant, bien que nombreuses, les données de la SMLM sont peu partagées par les laboratoires, en partie du fait de la taille importante de chaque fichier (de l’ordre d’un DVD pour chaque image super-résolutive).

Pour faciliter le partage de données, les chercheurs proposent ShareLoc.XYZ, une plateforme en ligne qui permet de visualiser, annoter et partager des images SMLM en 2D ou 3D. Pour éviter des temps de chargement qui peuvent parfois dépasser l’heure, les images sont visualisées selon un principe de chargement dynamique, similaire à celui de Google Maps.

L’équipe espère collecter des milliers d’images, pour l’instant, des centaines provenant de six laboratoires y sont déjà disponibles. L’objectif à terme sera non seulement d’entraîner ANNAPALM et d’autres logiciels similaires, mais aussi de proposer une collection de structures moléculaires à haute résolution utiles à d’autres fins de recherche, comme par exemple la recherche de structures similaires provenant d’autres molécules ou espèces biologiques.

Christophe Zimmer conclut :

« A terme, ShareLoc pourra servir de base à des algorithmes permettant de prédire la fonction de molécules mal connues à partir de leurs images super-résolutives. »

Sources de l’article :

« ShareLoc – an open platform for sharing localization microscopy data »

Nature Methods doi.org/10.1038/s41592-022-01659-0 21 octobre 2022

Wei Ouyang1,2#*, Jiachuan Bai1,3#, Manish Kumar Singh1,4, Christophe Leterrier5, Paul Barthelemy6, Samuel F.H. Barnett8,9,10, Teresa Klein7, Markus Sauer7, Pakorn Kanchanawong8,9, Nicolas Bourg6, Mickael M. Cohen4, Benoît Lelandais1, Christophe Zimmer1*

1Institut Pasteur, Université de Paris Cité, Unité Imagerie et Modélisation, F-75015 Paris, France

2Science for Life Laboratory, School of Engineering Sciences in Chemistry, Biotechnology and Health, KTH – Royal Institute of Technology, Stockholm, Sweden

3Sorbonne Université, Collège Doctoral, F-75005 Paris, France

4Laboratoire de Biologie Moléculaire et Cellulaire des Eucaryotes, Sorbonne Université, CNRS, UMR8226, Institut de Biologie Physico-Chimique, 75005 Paris, France.

5Aix Marseille Université, CNRS, INP UMR7051, NeuroCyto, Marseille 13005, France

6Abbelight, Cachan, France

7Department of Biotechnology and Biophysics Biocenter, University of Würzburg, Würzburg, Germany.

8Mechanobiology Institute, National University of Singapore, Singapore 117411, Singapore.

9Department of Biomedical Engineering, National University of Singapore, Singapore 117411, Singapore.

10present address: Max Planck Institute for Medical Research, Heidelberg 69120, Germany

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