La Commission européenne a dévoilé ce jeudi 11 janvier son intention d’investir conjointement avec les États membres dans la mise en place d’une infrastructure européenne de superordinateurs d’envergure mondiale.
Les superordinateurs sont nécessaires pour traiter des volumes de données toujours plus grands et procurer des avantages à la société dans de nombreux domaines allant des soins de santé et des énergies renouvelables à la sécurité automobile et à la cybersécurité.
L’infrastructure EuroHPC, pensée pour permettre le développement des nouvelles technologies dont l’intelligence artificielle
Le jalon posé par la Commission européenne est décrit comme étant essentiel pour la compétitivité et l’indépendance de l’Union dans l’économie fondée sur les données. À l’heure actuelle, les scientifiques et les entreprises d’Europe effectuent de plus en plus souvent le traitement de leurs données en dehors de l’UE car le temps de calcul disponible dans l’UE ne suffit pas à leurs besoins. Ce manque d’indépendance constitue une menace pour la vie privée, la protection des données, les secrets commerciaux et la propriété des données, notamment pour les applications sensibles.
Une nouvelle structure juridique et financière, l’entreprise commune EuroHPC, va acquérir, mettre en place et déployer dans toute l’Europe une infrastructure de calcul à haute performance (CHP) de classe mondiale. Elle appuiera également un programme de recherche et d’innovation afin de développer les technologies et machines (matériel informatique) ainsi que les applications (logiciels) qui fonctionneraient sur ces superordinateurs.
La contribution de l’UE à EuroHPC sera de l’ordre de 486 millions d’euros au titre de l’actuel cadre financier pluriannuel, complétée par un montant similaire provenant des États membres et des pays associés. Dans l’ensemble, environ 1 milliard d’euros de fonds publics seraient investis d’ici à 2020, et les membres privés de l’initiative apporteraient également des contributions en nature.
M. Andrus Ansip, vice-président de la Commission européenne chargé du marché unique numérique, a déclaré à ce propos:
«Les superordinateurs sont le moteur qui fait avancer l’économie numérique. La course est rude et l’Union est actuellement à la traîne: nous n’avons pas de superordinateurs dans les dix premiers du classement mondial.
Avec l’initiative EuroHPC, nous voulons donner aux chercheurs et aux entreprises d’Europe une capacité de calcul intensif de premier ordre au niveau mondial d’ici à 2020, afin de développer des technologies telles que l’intelligence artificielle et de concevoir les applications quotidiennes du futur dans des domaines tels que la santé, la sécurité ou l’ingénierie.»
Mme Mariya Gabriel, commissaire en charge de l’économie et de la société numériques, a ajouté pour sa part:
«Les superordinateurs sont déjà au cœur de grandes avancées et innovations dans de nombreux domaines qui concernent directement la vie quotidienne des citoyens européens. Ils peuvent nous aider à développer une médecine personnalisée, à faire des économies d’énergie et à lutter plus efficacement contre le changement climatique.
Une infrastructure européenne de calcul intensif plus performante offre de nombreuses possibilités de création d’emplois et représente un facteur clé pour le virage numérique de l’industrie et le renforcement de la compétitivité de l’économie européenne.»
Avantages du calcul intensif
Le calcul à haute performance est un instrument essentiel pour comprendre et relever les grands défis scientifiques et sociétaux, tels que le dépistage précoce et le traitement des maladies ou la mise au point de nouveaux traitements basés sur la médecine personnalisée et de précision. Il est également utilisé pour la prévention et la gestion des catastrophes naturelles de grande ampleur, notamment pour prévoir les trajectoires des ouragans ou établir des simulations de tremblement de terre.
L’infrastructure EuroHPC fournira aux entreprises européennes, et notamment aux petites et moyennes entreprises (PME), un meilleur accès aux superordinateurs afin de développer des produits innovants. L’utilisation du calcul à haute performance a un impact croissant sur les industries et sur les entreprises, en réduisant fortement les cycles de conception et de production des produits, en accélérant la conception de nouveaux matériaux, en minimisant les coûts, en utilisant plus efficacement les ressources et en abrégeant et optimisant les processus de décision. Par exemple, les cycles de production des voitures peuvent être ramenés de 60 à 24 mois grâce aux superordinateurs.
Le calcul à haute performance est également essentiel pour la sécurité et la défense nationales, lorsqu’il s’agit par exemple de mettre au point des technologies de cryptage complexes, de localiser des cyberattaques et d’y réagir, de déployer la criminalistique de manière efficace ou d’effectuer des simulations nucléaires.
La recherche et l’innovation soutenues par une infrastructure à la hauteur
Grâce à cette initiative, les investissements devraient donc être mis en commun afin d’établir des superordinateurs et des infrastructures de mégadonnées européens de premier plan. L’entreprise commune EuroHPC a pour objectif d’acquérir des systèmes de performance pré-exascale (1017 ou cent millions de milliards de calculs par seconde) et de soutenir le développement de systèmes de performance exascale (1018 ou un milliard de milliards de calculs par seconde) basés sur la technologie de l’UE, d’ici à 2022-2023.
Les activités de l’entreprise commune sont les suivantes:
- acquisition et exploitation de deux superordinateurs pré-exascale de classe mondiale et d’au moins deux machines de calcul intensif de milieu de gamme (capables d’effectuer environ 1016 calculs par seconde), en fournissant et gérant l’accès à ces superordinateurs pour un large éventail d’utilisateurs publics et privés à partir de 2020;
- programme de recherche et d’innovation en matière de calcul à haute performance visant à soutenir le développement de la technologie européenne dans le domaine du calcul intensif, y compris la première génération de la technologie européenne des microprocesseurs à faible consommation, ainsi que la conception conjointe de machines exascale, et à encourager les applications, le développement des compétences et l’usage plus général du calcul à haute performance.
L’entreprise commune EuroHPC exercera ses activités durant la période 2019-2026. L’infrastructure prévue sera détenue et exploitée conjointement par ses membres qui seront, dans un premier temps, les pays ayant signé la déclaration EuroHPC (liste ci-dessous) et des membres privés issus du milieu des universités et des entreprises. D’autres membres pourront se joindre à cette coopération à tout moment, moyennant leur contribution financière.
Contexte
Depuis 2012, la Commission promeut des initiatives de l’UE dans ce domaine, au nombre desquelles:
- l’initiative européenne sur l’informatique en nuage du 19 avril 2016, dans le cadre de sa stratégie du passage au numérique des entreprises européennes, a appelé à la création d’un écosystème européen de mégadonnées de premier plan, fondé sur une infrastructure de calcul à haute performance, de données et de réseaux de classe mondiale;
- la déclaration EuroHPC, signée le 23 mars 2017 lors de la Journée du numérique à Rome par sept États membres (la France, l’Allemagne, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal et l’Espagne), rejoints en 2017 par la Belgique, la Slovénie, la Bulgarie, la Suisse, la Grèce et la Croatie. Ces pays sont convenus de développer une infrastructure paneuropéenne intégrée de superordinateurs exascale. D’autres États membres et pays associés sont invités à signer la déclaration EuroHPC.