Alors que l’actualité porte sur des technologies comme ChatGPT, basées sur le traitement du langage naturel, des organisations à l’instar d’Earth Species Project (ESP), utilisent l’IA pour décoder la communication animale, ce qui pourrait faire progresser considérablement la recherche écologique et les efforts de conservation.
Cofondée par Katie Zacarian, Aza Raskin et Britt Selvitelle, Earth Species Project est une organisation à but non lucratif, basée en Californie, dédiée à l’utilisation de l’IA pour décoder la communication non humaine. Sa conviction est qu’une compréhension des langues non humaines transformera la relation de l’homme avec le reste de la nature. Elle a d’ailleurs construit des solutions technologiques qui ont un impact réel sur la conservation aujourd’hui.
Ses algorithmes reposent sur des paramètres multidimensionnels qui déterminent le contexte d’une phrase. Ils permettent d’analyser de grands ensembles de données contenant des communications visuelles, orales et physiques avec les animaux.
Dans un article du World Economic Forum, consacré à ce sujet, Katie Zacharian, qui en est la PDG, déclare :
“Nous sommes sur le point d’appliquer les progrès que nous constatons dans le développement de l’IA pour le langage humain à la communication animale. Avec ces progrès, nous prévoyons que nous nous dirigeons rapidement vers un monde dans lequel une communication bidirectionnelle avec une autre espèce est probable”.
Un travail collaboratif
Pour mener ses travaux, ESP s’est associée à plus de 40 biologistes et institutions du monde entier, elle collabore avec des experts de l’éthologie, de l’IA, de la linguistique, des mathématiques et des neurosciences.
Elle a par ailleurs formé trois partenariats clés avec des leaders en écologie comportementale, en biologie évolutive et en bioacoustique étudiant le comportement et la communication des cétacés ou les répertoires vocaux des corbeaux avec lesquels elle s’est engagée dans des projets de recherche en cours.
En octobre 2022, ESP a publié le premier benchmark open source pour mesurer la performance des algorithmes de ML dans la recherche bioacoustique. Nommé BEANS (the BEnchmark of ANimal Sounds), il comprend 12 ensembles de données couvrant diverses espèces, notamment les oiseaux, les mammifères terrestres (chats, chiens mais aussi gibbons ou éléphants) et marins (cétacés) les anoures (un ordre d’amphibiens comprenant la grenouille et le crapaud) et les insectes.
La communication entre les cétacés, baleines, dauphins et autres mammifères marins, est pour ESP un sujet d’intérêt majeur dans la recherche bioacoustique.
Katie Zacharian explique :
“Les cétacés sont particulièrement intéressants en raison de leur longue histoire – 34 millions d’années en tant qu’espèce culturelle socialement apprenante – parce que, comme la lumière ne se propage pas bien sous l’eau, une plus grande partie de leur communication est forcée par le canal acoustique”.
IA et bioacoustique au service de la conservation des espèces
Selon les scientifiques, la bioacoustique et l’analyse de la communication animale alimentée par l’IA peuvent faire progresser considérablement la recherche écologique et les efforts de conservation, en aidant les chercheurs et les défenseurs de l’environnement dans un large éventail de tâches vitales, telles qu’une surveillance plus efficace des populations, la reconnaissance des individus et des espèces, l’analyse de la diversité des espèces et l’approfondissement de la compréhension des impacts humains sur les espèces et leurs habitats.
Katie Zacharian commente :
” En surveillant les sons provenant de la nature, nous pouvons rechercher des changements dans la structure sociale, la transmission d’informations culturelles ou le stress physiologique”.
Aza Raskin conclut :
“J’aime penser que l’IA est similaire à l’invention de l’optique moderne, qui nous a donné le télescope et nous a aidés à voir que la Terre n’était pas au centre. Nous sommes maintenant à ce moment où nous avons de nouvelles échelles de données et l’IA nous donne la capacité de percevoir des modèles à grande échelle – pointer ce nouvel instrument sur les modèles de la planète nous aidera à voir que l’humanité n’est pas au centre”.