Chili : que signifie le vote à l’unanimité du projet de loi sur l’exploitation des neurotechnologies ?

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La Chambre du Sénat chilien a approuvé récemment à l’unanimité un projet de réforme constitutionnelle. Ce texte a notamment pour but de poser un cadre législatif autour de la protection de l’intégrité mentale et du statut des données neuronales. Le Chili deviendrait ainsi le premier pays au monde à légiférer clairement sur les neurotechnologies en réformant sa constitution. Le texte doit désormais être approuvé par la Chambre chilienne des députés.

Un cadre législatif pour les neurotechnologies

Initié par le sénateur Guido Girardi, la réforme a pour but de préserver l’intégrité physique et psychologique des individus et de faire en sorte qu’il soit impossible d’augmenter, diminuer ou modifier de quelque manière que ce soit cette intégrité individuelle sans le consentement de qui de droit. Un exemple évoqué consiste à améliorer les capacités mentales de certains individus, sans son accord, par stimulation neuronale à des fins militaires.

Guido Girardi s’est exprimé sur les neurotechnologies et l’intelligence artificielle :

“L’intelligence artificielle cherche à reproduire notre cortex cérébral avec des systèmes neuronaux artificiels. Plus les neurosciences progressent, plus l’IA avance et vice versa. Les deux se renforcent mutuellement et pourraient atteindre une vitesse de développement inimaginable.”

Il explique également qu’il “vise à protéger la dernière frontière de l’être humain, à savoir son esprit” :

“Si une technologie peut lire (vos pensées), avant même que vous ne soyez conscients de ce que vous pensez, elle peut écrire dans votre cerveau des émotions, des pensées, des histoires de vie qui ne sont pas les vôtres. Votre cerveau ne sera pas capable de les distinguer comme si elles étaient issues d’une pure création artificielle.”

Une réforme pour éviter des scénarios dystopiques

Le scientifique et neurobiologiste espagnol Rafael Yuste, de l’Université Colombia, a affirmé que des chercheurs ont déjà réussi à implanter dans le cerveau de souris cobayes, des images qu’ils n’ont jamais vues et qu’ils assimilent à leurs propres idées. Ils prennent ensuite en compte ces nouvelles informations dans leur comportement. De nombreuses voix s’élèvent également autour des recherches de Neuralink.

Si les scénarios dystopiques sont possibles, il existe bien évidemment de nombreuses neurotechnologies bénéfiques : l’implantation de stimulateurs cérébraux pour améliorer la vie de patients atteints de la maladie d’Alzheimer, de schizophrénie ou encore de la maladie de Parkinson. La création d’implants pour guérir la surdité ou la cécité est également évoquée.

Pour revenir sur le projet de loi chilien, quatre domaines fondamentaux seront pris en compte :

  • La sauvegarde des données de l’esprit humain ou “neurodonnées”.
  • La détermination d’une distribution équitable de l’accès à ces technologies.
  • La fixation des limites des “neuroalgorithmes”.
  • L’établissement des limites de la neurotechnologie de la lecture et surtout de l’écriture dans le cerveau.

Une législation qui pourrait inspirer d’autres pays

Selon Rafael Yuste, si les recherches continuent à se développer, des humains hybrides pourraient apparaître. Ils seraient augmentés cognitivement grâce aux neurotechnologies, avec des idées ou connaissances qui seraient le fruit d’algorithmes :

“Pour éviter une situation à deux vitesses avec des humains augmentés et d’autres qui ne le sont pas, nous pensons que ces neurotechnologies devraient être réglementées d’un point de vue de principe universel de justice, dans l’esprit de la Déclaration universelle des droits de l’Homme.”

La communauté internationale et notamment la France, l’Espagne et les États-Unis, pourraient suivre l’exemple chilien. C’est en tout cas ce qu’a appelé à faire le président chilien lors du 27e sommet ibéro-américain à la fin du mois d’avril.

En France, la situation est encore bien éloignée d’une reconnaissance de “neurodroits”. Toutefois, la loi Bioéthique de juillet 2011 évoque notamment la protection de l’intégrité mentale et des données neuronales dans l’article 16-14 du Code civil qui évoque que les techniques d’imagerie cérébrale ne peuvent être employées qu’à des fins médicales, de recherche scientifique ou d’expertises judiciaires avec un consentement écrit de la personne.

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