L’usage du téléphone au volant, bien que réprimandé par la loi, est une des principales causes de distraction des conducteurs. Malgré toutes les campagnes de sensibilisation, il se banalise : selon les chiffres de la sécurité routière, environ 69% des Français reconnaissent utiliser leur smartphone au volant. Des chercheurs de l’Université de l’Alberta testent une solution d’IA de la société Acusensus pour mesurer l’ampleur du problème de la distraction au volant au Canada et vérifier si cette technologie est un système de détection fiable pour les autorités.
Créée en 2018 par Alexander Jannink, basée à Melbourne, l’entreprise technologique Acusensus s’est donnée pour mission d’améliorer la sécurité routière en fournissant des solutions intelligentes pour susciter un changement de comportement sur les routes.
Sa solution « Heads-Up », développée pour donner aux autorités un outil efficace pour lutter contre la distraction au volant, a remporté l’Intertraffic Inspiration Award 2022.
Cette technologie peut être fournie sous la forme de caméras de surveillance fixes, de caméras mobiles montées sur remorque ou sur véhicule. Elle comprend un radar 3D haute définition qui mesure la vitesse, la portée et l’angle de toutes les cibles sur plusieurs voies. Les données peuvent d’ailleurs être utilisées pour fournir des informations sur les modèles de trafic et de vitesse, les données personnelles des conducteurs sont quant à elles protégées.
Lorsque l’IA, après avoir détecté automatiquement le conducteur, détermine la probabilité d’utilisation du téléphone, elle génère un fichier d’incident potentiel crypté et signé numériquement qui reste sur le système de caméra lui-même et exporte une image cryptée et signée numériquement du comportement incriminé au système de pré-arbitrage.
Pour les opérations en temps réel, les images des conducteurs fautifs peuvent être envoyées à un véhicule d’interception en attente en quelques secondes.
La société a lancé un programme combinant détection de téléphones mobiles et de ceintures de sécurité dans le Queensland en 2021, avec une baisse de 10% des décès au cours des six premiers mois, et un programme associant détection de vitesse, de téléphone mobile et de ceinture de sécurité dans l’État de Washington. Après la Nouvelle-Galles du Sud, où plus de 95 000 infractions pour utilisation illégale du téléphone ont été détectées en 90 jours, l’Australie et le Royaume-Uni, entre autres, c’est au tour de l’Alberta, au Canada, d’expérimenter la solution pour détecter l’utilisation des smartphones au volant.
Le projet pilote au Canada
L’Université d’Alberta se trouve à Edmonton, les caméras fixes d’Acusensus vont être déployées à différents endroits de la ville durant trois semaines avant d’être installées à Montréal, au Québec.
Le but de la recherche est de déterminer à quel point l’IA est en mesure de détecter les conducteurs qui utilisent leur téléphone cellulaire alors qu’ils sont au volant, selon Karim El-Basyouny, Professeur au département d’ingénierie civil et environnemental et titulaire de la Chaire de recherche en sécurité routière urbaine de la Ville d’Edmonton, à l’Université de l’Alberta.
le Dr El-Basyouny est un expert des questions de prévention des accidents de la route, de modélisation des accidents et d’analyse des interventions de sécurité. Il a été le chercheur principal de l’évaluation du projet pilote de réduction des limites de vitesse résidentielles à Edmonton, ainsi que de plusieurs autres projets de recherche et d’évaluation en Alberta et en Colombie-Britannique.
Mesurer l’ampleur de l’usage du téléphone au volant
Selon Karim El-Basyouny, au Canada, la moyenne des personnes qui utilisent leur téléphone tout en conduisant est de 7 % et en Alberta, cette moyenne serait de 5,3 %. Il rappelle toutefois que ces chiffres proviennent uniquement des contraventions données par les policiers aux contrevenants, ils ne correspondent donc pas à la réalité.
Ces infractions au Code de la route pour distraction au volant sont relevées par des policiers qui cherchent à voir si le conducteur utilise un téléphone à travers le pare-brise d’une voiture ou en conduisant près d’un véhicule.
« Ça nécessite beaucoup de travail, beaucoup de regards furtifs, dans des conditions difficiles. C’est la seule solution viable actuellement et ce n’est pas idéal. […] Le but [de cette étude] est d’essayer de comprendre l’ampleur réelle du problème. »
Les automobilistes albertains peuvent recevoir une amende de 287 $ pour distraction au volant et trois points d’inaptitude. Mais dans le cadre de ce projet-pilote, aucune contravention ne sera donnée.
Ce projet pilote est financé par l’Université de l’Alberta et le Service de police de la ville d’Edmonton. Le rapport final sera dévoilé en octobre 2023.