Une affaire récemment jugée impliquant Air Canada soulève la question de la responsabilité des entreprises vis-à-vis des réponses fournies par leurs chatbots, aujourd’hui couramment utilisés comme outils de communication et de service à la clientèle. Elle met en lumière que, si les consommateurs doivent être vigilants quant aux informations reçues des chatbots, les entreprises doivent également être prêtes à en assumer la responsabilité.
Jake Moffatt a utilisé le chatbot d’Air Canada pour demander des informations sur les tarifs de deuil après le décès de sa grand-mère en 2022. Le chatbot a indiqué que la compagnie offrait des tarifs réduits, ce qui est avéré, et qu’il pourrait bénéficier de la réduction jusqu’à 90 jours après le vol en déposant une demande, ce qui était faux.
Il a donc réservé son vol, convaincu de la véracité de cette information. Mais, lorsqu’à son retour, il a voulu se faire rembourser, on lui a répondu que la politique de deuil d’Air Canada exigeait que la réduction soit approuvée à l’avance et n’était pas rétroactive. La compagnie a voulu faire un geste amiable, proposant 200. Il a donc décidé de saisir le tribunal civil pour obtenir gain de cause.
Air Canada a tenté de se dédouaner de la responsabilité du chatbot, en affirmant qu’il s’agissait d’une “entité juridique distincte” et que par conséquent, il ne pouvait être tenu responsable des réponses apportées. Il ajoutait que si le client avait ouvert le lien dirigeant vers sa politique de deuil dans la réponse de ce dernier, il aurait pu constater que le remboursement n’était pas rétroactif.
Christopher C. Rivers, membre du Civil Resolution Tribunal (CRT) qui a instruit l’affaire, n’a pas été convaincu par ces arguments, déclarant :
“Il s’agit d’un mémoire remarquable. Bien qu’un agent conversationnel comporte une composante interactive, il ne s’agit toujours que d’une partie du site Web d’Air Canada. Il devrait être évident pour Air Canada qu’elle est responsable de toute l’information sur son site Web. Peu importe que l’information provienne d’une page statique ou d’un chatbot”.
Concluant qu’Air Canada n’avait pas pris les précautions raisonnables pour s’assurer que son agent conversationnel était exact, il a ordonné à Air Canada de verser à M. Moffatt un total de 812 de dommages et intérêts.
La satisfaction client est essentielle pour la croissance des entreprises, 70% des consommateurs déclarent d’ailleurs que, pour eux, l’expérience client est aussi importante que le produit ou le service. Alors que les chatbots sont de plus en plus déployés au sein des organisations, celles-ci doivent donc veiller à ce qu’ils soient fiables, précis et transparents, et qu’ils respectent les droits et les attentes des consommateurs.
Dans le cas contraire, elles doivent être prêtes à en assumer les conséquences, tant sur le plan juridique que sur le plan de leur réputation et de la fidélité client. Les entreprises doivent donc accorder une attention particulière à la manière dont leurs chatbots sont conçus, mis en œuvre et supervisés.