“L’intelligence artificielle et nous” : un dialogue entre Gaspard Koenig et Cédric Villani

Si l’arrivée de ChatGPT a soulevé un grand enthousiasme, de nombreux débats autour de l’impact de l’IA générative sur nos vies et le futur de l’humanité font désormais la une des médias. Pour nous apporter un éclairage sur le sujet, l’institut Messine vient de mettre en ligne la note “L’intelligence artificielle et nous”, fruit d’un dialogue croisé de 3hrs30 entre Gaspard Koenig et Cédric Villani.

Créé en 2014 avec le soutien de la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes, l’Institut Messine est un think tank qui rassemble en son sein des représentants de la société civile et de la profession des commissaires aux comptes dans le but de réfléchir aux grands enjeux économiques et sociétaux. S’attachant plus particulièrement aux questions de transparence et de confiance, il formule puis soumet au débat des idées et des solutions susceptibles de nourrir la réflexion et l’action des décideurs publics.

Pour Michel Léger, président de l’Institut :

“Est-on réellement face à un bouleversement anthropologique ? S’agit-il d’une révolution technologique et industrielle ? Notre rapport à la connaissance va-t-il changer ? Est-ce la fin du travail ? Le sujet nous plonge dans un abyme de questionnements”.

Pour tenter d’y répondre, l’Institut a fait appel à deux personnalités ayant pris le temps de travailler en profondeur sur l’IA. Cédric Villani, mathématicien reconnu (médaille Fields 2010), auteur du rapport “Donner un sens à l’intelligence artificielle” (2018) qui a inspiré la stratégie nationale pour l’intelligence artificielle et Gaspard Kœnig, essayiste et philosophe, qui a rencontré plus de 120 professeurs, entrepreneurs, intellectuels, politiques, économistes, artistes, pour son livre “La Fin de l’individu : Voyage d’un philosophe au pays de l’intelligence artificielle”, éditions de l’Observatoire (2019).

Michel Léger souligne :

“Ce sont ainsi deux esprits, amis par ailleurs, qui ont accepté de se prêter au jeu de cet entretien croisé et qui nous apportent leur regard. Ils abordent la genèse de l’intelligence artificielle et des Large Language Models ; traitent des algorithmes et du nudge ; convoquent Rousseau, Socrate ou encore Hayek ; passent par la philosophie confucéenne, le jeu de go et la géopolitique ; évoquent l’agriculture, l’éducation ou encore l’urbanisme”.

Le 19 juin dernier, l’Institut Messine a organisé une conférence animée par Philippe Audouin, membre du Comité directeur de l’Institut, durant laquelle ils sont revenus sur les points principaux de la note avec Laurence Devillers, spécialiste des interactions homme-machine, professeur d’intelligence artificielle au LIMSI-CNRS et auteur de “Des robots et des Hommes”.

Ils ont ainsi souligné le rôle disproportionné donné à l’IA. Pour Gaspard Koenig, dans 20 ans, la priorité de l’humanité sera l’eau et les terres fertiles. Alors qu’on nous martèle que nous devons rattraper notre retard sur les USA et La Chine, toutes les entreprises n’ont pas besoin d’IA. Cédric Villani est tout à fait d’accord avec lui : bien que l’IA est un sujet passionnant, il n’est en aucun cas fondamental pour l’humanité. Selon lui, les investissements mondiaux dans l’IA sont bien trop importants, la captation carbone, une arnaque. Il y a des problèmes bien plus graves que l’IA ne peut résoudre mais pourrait aggraver : la montée des tensions géopolitiques, la raréfaction des sols, les inégalités entre pays, la solitude dans les pays occidentaux… Le sujet le plus important de l’IA cette année sera l’écologie.

Selon lui, le buzz fait autour de l’IA obscurcit le débat public : Elon Musk n’hésite pas à alerter sur la destruction de l’humanité et à côté est à la recherche de milliards pour sa start-up xAI, Sam Altman et d’autres ont fait de même, et ce, avant tout pour se faire de la publicité.

Pour Gaspard Koenig, une IA générative n’a rien à voir avec la science : “La science est censée nous donner la compréhension des phénomènes ; l’IA fait exactement l’inverse”. ChatGPT va nous donner des réponses plausibles, mais tout vérifier est une perte de temps considérable, et faute de source, on ne peut réfuter ses allégations, contrairement à Wikipédia, où il est toujours possible d’engager un dialogue avec les contributeurs. Nous risquons non seulement de perdre notre libre arbitre, mais également de nous diriger vers une homogénéisation médiocre des connaissances.

Laurence Devillers a souligné le potentiel de l’usage de l’IA pour certains secteurs, mais a soulevé les considérations éthiques que peuvent poser certaines pratiques comme la programmation d’organoïdes vivants.

Les sujets abordés lors de cette conférence font partie des réflexions sur l’IA à retrouver dans la note “L’intelligence artificielle et nous”.

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